J'ai beaucoup aimé
Titre : Les trois vies de Babe Ozouf
Auteur : Didier DECOIN
Editeur : Seuil
Parution : 1983
Pages : 384
Présentation de l'éditeur :
Là-haut, tout au bout de la France, c'est la Hague, terre de granits et
de landes fauves, qui poignarde l'une des mers les plus dangereuses du
monde. Babe Ozouf, Catherine et Carole sont filles de la Hague. Leur
saga - qui s'étend sur trois générations - est scandée par un même
geste, un acte que l'amour inspire : faire naître la lumière et le feu
dans la nuit. Par trois fois, ce geste simple et fatal provoquera un
naufrage : naufrage de navires et naufrage de trois destins. Emmenée
par deux gendarmes, Babe Ozouf va vivre une mise à l'épreuve qui sera
aussi une délivrance. Sa fille Catherine, mariée à quinze ans, connaîtra
l'exil, de l'autre côté de l'océan. Et Carole, la fille de Catherine,
sera irrésistiblement rappelée vers cette falaise, lieu de rencontre
avec la nuit et le brouillard. Trois hommes traverseront la vie de ces
jeunes femmes : Michael Bernstein, le pianiste ; le peintre Louis Asfrid
et le mystérieux Recruteur qui hante les quais de Liverpool. Ils
apprendront que l'amour est aussi ce calme effrayant qui précède et
annonce les tempêtes. "La Hague, dit l'auteur, ne m'a pas inspiré ce
roman : elle me l'a imposé. Je l'ai écrit dans la solitude, le tumulte
et la passion, à l'image du pays étrange qui l'a fait surgir."
Avis :
Si vous avez lu ma précédente critique d’Avec vue sur la mer, vous avez compris que Didier Decoin est viscéralement attaché à la Hague. S’inspirant de multiples détails vécus, il a magnifié cette passion en une étrange et obsédante histoire, qu’il relate à sa façon remarquablement sensorielle : éclats de lumière des phares de Goury et d’Aurigny, mugissement du vent et fracas des vagues sur les rochers, nuées sombres ou brumes ouatées, eau qui gifle ou qui imprègne, puissante odeur de la mer et goût du sel sur les lèvres, érotisme prégnant…
L’atmosphère du livre embarque le lecteur pour un voyage dans un bout du monde propice aux mythes, comme celui des naufrageuses. De 1800 à 1944, de mère en fille, trois femmes vont se voir irrémédiablement et dramatiquement liées, par une troublante répétition du destin, à cette pointe rocheuse dans la mer, où les hommes s’accrochent comme des berniques à une existence âpre et isolée. Une sorte d’acharnement du sort les transformera à leur corps défendant en vecteur du mal, mi-anges, mi-sorcières, objets de fantasme et de vénération, que l’amour brûlera au propre comme au figuré.
Une certaine magie imprègne ce récit envoûtant et subtil, qui classe encore une fois Didier Decoin parmi les grands romanciers. (4/5)
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