mardi 5 mars 2019

[Hermary-Vieille, Catherine] L'Ange noir





J'ai beaucoup aimé

Titre : L'Ange noir

Auteur : Catherine HERMARY-VIEILLE

Editeur : Plon

Parution : 1998

Pages : 442








 

Présentation de l'éditeur :   

1798 dans le Nouveau Monde. Lorsque Nancy donne la vie à son petit Nat, la belle Abyssine voit qu'il porte sur la poitrine trois taches qui forment une sorte de triangle. Pas de doute, c'est le signe de Dieu. Celui qui deviendra le prophète du peuple noir possède déjà la "marque des rois". Elle vient d'enfanter l'Espoir. Bien vite, les orphelins de l'Afrique, vendus comme esclaves aux nantis du Nouveau Monde, vont venir écouter les promesses de liberté que délivre leur nouveau Prêcheur. Mais si les sermons envoûtants ont le pouvoir d'invoquer l'insubordination, les mots ne suffisent pas à parer les coups de l'ennemi blanc. Pour les opprimés noirs du début du XIXe siècle, la réponse est sans appel : "Ceux qui recevaient le fouet en tiendront désormais le manche."

 

 

Avis :

Nat Turner a été jugé par ses contemporains comme un meurtrier particulièrement sanguinaire, aux actes totalement atroces et incompréhensibles. De nos jours encore, dans le Sud des Etats-Unis, les mères continuent de menacer les garnements du "vieux Nat" pour les impressionner. 

Catherine Hermary-Vieille revient sur la vie de cet esclave noir à la fin du XIXème siècle en Virginie et apporte un éclairage objectif sur la société de l'époque, son ordre économique et social, les mentalités et les convictions qui ont conduit au drame et à sa condamnation sans appel. Fils d'une Africaine arrachée à son pays et vendue à un fermier de Virginie, Nat a été élevé par sa mère dans le souvenir de ses racines, dans un profond mysticisme, et avec l'espoir qu'il connaisse un sort meilleur que celui de ses semblables en Amérique. Hélas, de déceptions en humiliations, Nat se retrouvera par désespoir à la tête de la révolte sanglante et violemment réprimée d'une poignée d'esclaves, trente ans avant l'abolition de l'esclavage aux Etats-Unis. 

Derrière le meurtrier, se dessine le portrait méconnu d'un homme intelligent, profondément croyant et désespéré, qui, parce qu'on ne lui aura pas laissé d'autre alternative, aura tenté le premier, au prix d'un sacrifice et d'un acte terribles, de faire entendre une voix pour la dignité et la liberté des esclaves. 

Offrant enfin à Nat Turner la possibilité de se faire entendre, ce roman historique qui ne peut laisser indifférent est aussi d'une lecture agréable, fluide et addictive. (4/5)


Citations :

Nat Turner matérialisait les difficultés d’une société tout entière et, pour rendre une équitable justice, c’est un ordre social et économique, des convictions et des dogmes qu’il aurait fallu soumettre au jugement des consciences. Et de cette tâche, le juge Cob se sentait incapable. 
            
Parce qu’on ne lui avait laissé aucun choix, il avait exprimé avec violence la désespérance des siens, commis le crime de rendre œil pour œil, dent pour dent.       
   
Si des Blancs prisonniers en Afrique avaient tué soixante indigènes pour regagner leur liberté, les leurs les auraient accueilli en héros.          

La confiance disparue, méfiance et incompréhension s’installèrent (de nos jours encore, dans le Sud, une mère menace un enfant désobéissant d’appeler « le vieux Nat »). Mais il fallut encore plus de trente années pour que l’esclavage soit aboli aux Etats-Unis. Nat aurait eu soixante-quatre ans.

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