Coup de coeur 💓💓
Titre : La Petite Bonne
Auteur : Bérénice PICHAT
Parution : 2024 (Les Avrils)
Pages : 272
Présentation de l'éditeur :
Domestique au service des bourgeois, elle est travailleuse, courageuse,
dévouée. Mais ce week-end-là, elle redoute de se rendre chez les
Daniel. Exceptionnellement, Madame a accepté d’aller prendre l’air à
la campagne. Alors la petite bonne devra rester seule avec Monsieur, un
ancien pianiste accablé d’amertume, gueule cassée de la bataille de la
Somme. Il faudra cohabiter, le laver, le nourrir. Mais Monsieur a un
autre projet en tête. Un plan irrévocable, sidérant. Et si elle
acceptait ? Et si elle le défiait ? Et s’ils se surprenaient ?
Le mot de l'éditeur sur l'auteur :
Avis :
Trois personnages, trois voix intérieures, qui, à l’image de la mise en page – fer à gauche pour la petite bonne, fer à droite pour Monsieur ou Madame –, ne se rejoindront jamais, chacune prisonnière de son irrémédiable solitude. Il s’en faudra pourtant de peu, mais en ces années 1930 en région parisienne, il n’est pas jusqu’au sort lui-même qui semble s’allier au strict maintien des convenances sociales. Intercalant dans le récit en prose classique les volutes de vers libres portant chaque voix comme un chant, Bérénice Pichat déroule la superbe et originale partition d’une implacable tragédie.
« Elle » n’a pas de nom, elle est juste la petite bonne qui, laissant à l’aube les rustres violences de son homme et la secrète culpabilité d’un avortement dicté par la misère, partage ses industrieuses journées entre les demeures bourgeoises de ses employeurs. Eux sont les Daniel, un couple de la haute société que le malheur s’est chargé d’ostraciser d’une autre manière. Pianiste recraché par la Grande Guerre à l’état de gueule cassée, défiguré, amputé des jambes et des doigts, Blaise vit terré dans sa chambre, repoussant la compassion avec une rage qui a fini par rendre son caractère aussi monstrueux que le reste. Si son infirmité ne l’en empêchait, il aurait depuis longtemps usé de son revolver pour mettre fin à son calvaire et rendre ainsi sa liberté à Alexandrine, l’épouse dont il ne supporte plus le dévouement et les sacrifices.
« Elle » n’a pas de nom, elle est juste la petite bonne qui, laissant à l’aube les rustres violences de son homme et la secrète culpabilité d’un avortement dicté par la misère, partage ses industrieuses journées entre les demeures bourgeoises de ses employeurs. Eux sont les Daniel, un couple de la haute société que le malheur s’est chargé d’ostraciser d’une autre manière. Pianiste recraché par la Grande Guerre à l’état de gueule cassée, défiguré, amputé des jambes et des doigts, Blaise vit terré dans sa chambre, repoussant la compassion avec une rage qui a fini par rendre son caractère aussi monstrueux que le reste. Si son infirmité ne l’en empêchait, il aurait depuis longtemps usé de son revolver pour mettre fin à son calvaire et rendre ainsi sa liberté à Alexandrine, l’épouse dont il ne supporte plus le dévouement et les sacrifices.
Mais, grande première : mise en confiance par cette nouvelle bonne pour une fois pas le moins du monde effarouchée par l’état de l’estropié, l’épouse se décide enfin à accepter une invitation. Le temps d’une partie de chasse à la campagne, voilà Monsieur, son revolver et la bonne, seuls pour deux jours. Dans l’absolue proximité physique exigée par l’infirmité, le duo de leurs voix intérieures gagne rapidement en intimité, et tandis que l’épouse se débat de son côté entre devoir d’abnégation et culpabilité, se dessinent en transparence, d’une manière poétique et musicale, des portraits psychologiques de la plus grande finesse. Entre le mutilé de guerre, son épouse mutilée sociale, et la bonne mutilée d’enfant, se joue la partition de voix qui, pour être en canon, n’en resteront pas moins à jamais irréconciliables.
D’une créativité formelle impeccablement en accord avec l’ébauche de dialogue qui tente vainement de se mettre en place entre des êtres malgré eux plus proches que les conventions sociales ne sauraient l’admettre, un livre d’une grande beauté et d’une parfaite justesse jusque que dans son dénouement inattendu. Coup de coeur. (5/5)
Citations :
Les vrais héros sont partis
morts depuis longtemps
Fauchés à la sortie des tranchées
Tombés dans le no man’s land
Eux ne gisent pas sur un lit médical
Eux ne croupissent pas dans une villa
Eux n’ont pas besoin d’une bonniche
Qui les torche et les nourrit
morts depuis longtemps
Fauchés à la sortie des tranchées
Tombés dans le no man’s land
Eux ne gisent pas sur un lit médical
Eux ne croupissent pas dans une villa
Eux n’ont pas besoin d’une bonniche
Qui les torche et les nourrit
on m’a dit
La liberté commence au fond de soi
Mais on ne m’a pas montré
Comment trouver le fond
pour espérer pouvoir remonter
Depuis
j’explore
Sans parvenir
À reprendre mon souffle
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