J'ai beaucoup aimé
Titre : Shuni
Auteur : Naomi FONTAINE
Parution : 2019 au Québec, 2020 en France
Editeur : Mémoire d'encrier
Pages : 160
Présentation de l'éditeur :
Naomi Fontaine écrit une longue lettre à
son amie Shuni, une jeune Québécoise venue dans sa communauté pour aider
les Innus. Elle convoque l’histoire. Surgissent les visages de la mère,
du père, de la grand-mère. Elle en profite pour s’adresser à Petit ours,
son fils. Les paysages de Uashat défilent, fragmentés, radieux. Elle
raconte le doute qui mine le cœur des colonisés, l’impossible combat
d’être soi. Shuni, cette lettre fragile et tendre, dit la force d’inventer l’avenir, la lumière de la vérité. La vie est un cercle où tout recommence.
Le mot de l'éditeur sur l'auteur :
Née en 1987 à Uashat, communauté innue,
Naomi Fontaine est romancière et enseignante. Après le succès populaire
de ses deux premiers récits Kuessipan (2011) et Manikanetish (2017), elle publie Shuni.
Lauréate au Prix littéraire des collégiens 2020
Lauréate au Prix littéraire des lycéens AIEQ 2020
Lauréate Une ville, un livre 2020 (Ville de Québec)
Prix Voix autochtones 2020 – catégorie textes en prose publiés en français
Finaliste Prix Frye Académie 2020-2021
Lauréate au Prix littéraire des lycéens AIEQ 2020
Lauréate Une ville, un livre 2020 (Ville de Québec)
Prix Voix autochtones 2020 – catégorie textes en prose publiés en français
Finaliste Prix Frye Académie 2020-2021
Avis :
La famille innue de l’auteur vit dans une réserve sur la côte Nord du Québec. Lorsque son amie Julie – Shuni selon la prononciation innue -, s’apprête à venir s’installer à proximité en tant que missionnaire, Naomi Fontaine lui écrit une longue lettre. Convoquant le passé au travers de sa mère et de sa grand-mère, mais aussi l’avenir par le biais de son fils Petit Ours, elle évoque la survivance de l’identité innue malgré les blessures laissées par le colonialisme et le suprémacisme blanc, et ses espoirs d’un futur plus fraternel, enfin égalitaire, bâti sur un véritable équilibre politique entre Québécois et Autochtones.
Plus qu’un roman, ce texte est un récit personnel et militant pour la cause amérindienne au Québec. Au travers de l’expérience des femmes de sa famille sur plusieurs générations et de ses propres confrontations aux préjugés, l’auteur raconte les souffrances d’un peuple qu’on s’est bel et bien efforcé d’anéantir au nom du progrès contre la « sauvagerie », ses propres regrets de s’être fait voler une part de son identité qu’il lui a fallu apprendre à se réapproprier, à assumer et à défendre, et sa révolte contre la dévalorisation d’une culture dont elle réclame la reconnaissance à part entière.
Pour toutes les Julie que nous sommes potentiellement, cette longue lettre illustre par maints exemples les différences culturelles qui, au lieu de nous opposer, devraient contribuer à notre enrichissement mutuel. Notion de liberté, perception du temps et donc de la vie, place des femmes et des enfants, importance des émotions et du relationnel… : autant de clés que nous remet l’auteur pour nous ouvrir l’esprit et pour plaider l’acceptation égalitaire de nos particularités.
Si l’on devine l’émotion et la douleur à fleur de mots, le discours de Naomi Fontaine est remarquable de dignité, d’espoir et d’élan constructif. Il fait d’elle une véritable ambassadrice de la cause innue au Québec, mais aussi de tous les peuples assujettis au cours de l’Histoire au nom d’une suprématie raciale imaginée, entre autres, à partir d’une certaine idée du progrès. (4/5)
Plus qu’un roman, ce texte est un récit personnel et militant pour la cause amérindienne au Québec. Au travers de l’expérience des femmes de sa famille sur plusieurs générations et de ses propres confrontations aux préjugés, l’auteur raconte les souffrances d’un peuple qu’on s’est bel et bien efforcé d’anéantir au nom du progrès contre la « sauvagerie », ses propres regrets de s’être fait voler une part de son identité qu’il lui a fallu apprendre à se réapproprier, à assumer et à défendre, et sa révolte contre la dévalorisation d’une culture dont elle réclame la reconnaissance à part entière.
Pour toutes les Julie que nous sommes potentiellement, cette longue lettre illustre par maints exemples les différences culturelles qui, au lieu de nous opposer, devraient contribuer à notre enrichissement mutuel. Notion de liberté, perception du temps et donc de la vie, place des femmes et des enfants, importance des émotions et du relationnel… : autant de clés que nous remet l’auteur pour nous ouvrir l’esprit et pour plaider l’acceptation égalitaire de nos particularités.
Si l’on devine l’émotion et la douleur à fleur de mots, le discours de Naomi Fontaine est remarquable de dignité, d’espoir et d’élan constructif. Il fait d’elle une véritable ambassadrice de la cause innue au Québec, mais aussi de tous les peuples assujettis au cours de l’Histoire au nom d’une suprématie raciale imaginée, entre autres, à partir d’une certaine idée du progrès. (4/5)
Citations :
On m’a demandé quel était le plus beau mot de la langue française.
Le voici Liberté.
C’est un mot qui n’existe pourtant pas dans ma langue. La liberté est un concept intrinsèque à tout ce qui existe dans notre vision du monde. Nous sommes issus d’un espace sans clôtures, sans frontières. Des êtres libres dès l’enfance, dès que le petit devient autonome. Même les animaux, on ne les capturait pas pour en faire un élevage. C’est un état qui n’a jamais eu besoin d’être nommé.
Il suffit d’une nuit dans une tente de prospecteur pour imaginer, pour peu qu’on ait de l’imagination, ce qu’était le vrai travail des nomades. Abattre les arbres, les ébrancher, des troncs de la bonne longueur, de la bonne solidité. La centaine de branches de sapins à cueillir. En faire un tapis. Et monter cette tente, qu’il faudra aussitôt démonter. Une nuit suffit. Pour le respect. Mes ancêtres, ceux qu’ils ont appelés Sauvages, n’ont jamais été contre le fait de faciliter leur mode de vie.
Ce n’est pas la modernité qui nous a presque tués. C’est l’idée impossible qu’une race puisse être supérieure à une autre. Ça, tu vois, même aujourd’hui, nous ne pouvons pas le concevoir.
C’est ainsi chez moi, le travail est fondateur. L’art est spirituel. Il est peu probable de songer à combiner le travail et l’art. Et il n’est recommandé à personne d’espérer vivre seulement de son talent.
Que ce soit le territoire ou la politique, je crois que les Québécois possèdent quelque chose que peu de peuples possèdent : l’esprit de longévité. Ils croient fermement à leur avenir. Ils ne sont pas nostalgiques des gloires passées. Au contraire, ils sont centrés sur demain. Sur ce qu’ils légueront à leurs enfants. Il suffit de constater leur ardeur pour l’environnement.
Le voici Liberté.
C’est un mot qui n’existe pourtant pas dans ma langue. La liberté est un concept intrinsèque à tout ce qui existe dans notre vision du monde. Nous sommes issus d’un espace sans clôtures, sans frontières. Des êtres libres dès l’enfance, dès que le petit devient autonome. Même les animaux, on ne les capturait pas pour en faire un élevage. C’est un état qui n’a jamais eu besoin d’être nommé.
Il suffit d’une nuit dans une tente de prospecteur pour imaginer, pour peu qu’on ait de l’imagination, ce qu’était le vrai travail des nomades. Abattre les arbres, les ébrancher, des troncs de la bonne longueur, de la bonne solidité. La centaine de branches de sapins à cueillir. En faire un tapis. Et monter cette tente, qu’il faudra aussitôt démonter. Une nuit suffit. Pour le respect. Mes ancêtres, ceux qu’ils ont appelés Sauvages, n’ont jamais été contre le fait de faciliter leur mode de vie.
Ce n’est pas la modernité qui nous a presque tués. C’est l’idée impossible qu’une race puisse être supérieure à une autre. Ça, tu vois, même aujourd’hui, nous ne pouvons pas le concevoir.
C’est ainsi chez moi, le travail est fondateur. L’art est spirituel. Il est peu probable de songer à combiner le travail et l’art. Et il n’est recommandé à personne d’espérer vivre seulement de son talent.
Que ce soit le territoire ou la politique, je crois que les Québécois possèdent quelque chose que peu de peuples possèdent : l’esprit de longévité. Ils croient fermement à leur avenir. Ils ne sont pas nostalgiques des gloires passées. Au contraire, ils sont centrés sur demain. Sur ce qu’ils légueront à leurs enfants. Il suffit de constater leur ardeur pour l’environnement.
Chez moi, Shuni, ce qui prime, ce sont les relations. Leur importance surpasse l’argent, l’éducation, la politique, la réussite, l’environnement, la spiritualité et le sexe. Tout est une question de relations. Les liens entre les êtres humains. Ça n’a rien à voir avec le genre, l’âge, les diplômes ou le salaire. Ni même la nationalité. Leur essence se trouve plutôt dans l’intensité avec laquelle une personne s’investit ou non avec une autre. Une question de proximité et de distance. On te jugera pour ça.
Entretenir les visites, les appels téléphoniques, les soupers familiaux et les après-midis à la plage est une affaire sérieuse. Ils t’en voudront parce que tu auras décliné une invitation. Ils croiront que tu refuses leur compagnie. Aussi rapidement que tu l’auras offerte, ton amitié sera jetée aux oubliettes.
Tout part des relations. Les belles choses. L’entraide, la sollicitude, les soirées autour de la table à boire de la Budweiser en canettes et à rire jusqu’aux petites heures, les séjours au chalet, la chasse, le partage, les confidences, le respect.
Les choses qui font honte aussi. Le favoritisme du Conseil de bande, la jalousie, les bagarres en pleine nuit, la première ligne de coke, la politique, les fausses plaintes à la Direction de la protection de la jeunesse, le décrochage scolaire.
L’importance que l’on accorde aux relations est restée aussi solide qu’elle l’était autrefois, lorsque dans la forêt, vivre en clan était une question de survie. Aujourd’hui encore, il vaut mieux soigner ses amitiés que son brushing, ou même sa maison. Crois-moi, dans une telle société, l’exclusion est un état insupportable.
Quelques fois on m’a demandé de participer à des associations féministes, ou d’écrire un texte féministe. Je conçois qu’ailleurs les femmes aient dû se battre pour leurs droits et pour l’égalité. Dans les sociétés dominées par les hommes, forcément leur victoire a changé le monde. Mais Shuni, les choses sont bien différentes chez moi. Mon oncle m’a raconté que lorsque les hommes revenaient de plusieurs jours de chasse, bredouilles et affamés, affaiblis par les longs déplacements, ce sont les femmes qui les nourrissaient grâce à la chasse au petit gibier. Ces hommes savaient que leur survie dépendait d’elles. Ils les respectaient pour ça. Ils les aimaient.
Aujourd’hui encore, malgré la transformation du mode de vie, les femmes innues possèdent une force de caractère qu’aucune soumission religieuse n’est parvenue à éteindre. Je peux bien te l’avouer à toi, Shuni, je ne suis pas féministe. Je ne ressens pas le besoin de me défendre en tant que femme. Je n’ai jamais douté de ma valeur de femme. On ne m’a pas éduquée ainsi.
Les blessures les plus réelles, les plus douloureuses, sont celles qui marquent l’âme. Et j’ai cette autre croyance. Les mots empreints d’amour, de compréhension et d’affirmation peuvent guérir également.
Entretenir les visites, les appels téléphoniques, les soupers familiaux et les après-midis à la plage est une affaire sérieuse. Ils t’en voudront parce que tu auras décliné une invitation. Ils croiront que tu refuses leur compagnie. Aussi rapidement que tu l’auras offerte, ton amitié sera jetée aux oubliettes.
Tout part des relations. Les belles choses. L’entraide, la sollicitude, les soirées autour de la table à boire de la Budweiser en canettes et à rire jusqu’aux petites heures, les séjours au chalet, la chasse, le partage, les confidences, le respect.
Les choses qui font honte aussi. Le favoritisme du Conseil de bande, la jalousie, les bagarres en pleine nuit, la première ligne de coke, la politique, les fausses plaintes à la Direction de la protection de la jeunesse, le décrochage scolaire.
L’importance que l’on accorde aux relations est restée aussi solide qu’elle l’était autrefois, lorsque dans la forêt, vivre en clan était une question de survie. Aujourd’hui encore, il vaut mieux soigner ses amitiés que son brushing, ou même sa maison. Crois-moi, dans une telle société, l’exclusion est un état insupportable.
Quelques fois on m’a demandé de participer à des associations féministes, ou d’écrire un texte féministe. Je conçois qu’ailleurs les femmes aient dû se battre pour leurs droits et pour l’égalité. Dans les sociétés dominées par les hommes, forcément leur victoire a changé le monde. Mais Shuni, les choses sont bien différentes chez moi. Mon oncle m’a raconté que lorsque les hommes revenaient de plusieurs jours de chasse, bredouilles et affamés, affaiblis par les longs déplacements, ce sont les femmes qui les nourrissaient grâce à la chasse au petit gibier. Ces hommes savaient que leur survie dépendait d’elles. Ils les respectaient pour ça. Ils les aimaient.
Aujourd’hui encore, malgré la transformation du mode de vie, les femmes innues possèdent une force de caractère qu’aucune soumission religieuse n’est parvenue à éteindre. Je peux bien te l’avouer à toi, Shuni, je ne suis pas féministe. Je ne ressens pas le besoin de me défendre en tant que femme. Je n’ai jamais douté de ma valeur de femme. On ne m’a pas éduquée ainsi.
Les blessures les plus réelles, les plus douloureuses, sont celles qui marquent l’âme. Et j’ai cette autre croyance. Les mots empreints d’amour, de compréhension et d’affirmation peuvent guérir également.
En son nom et au mien, je veux donner un conseil amical aux anthropologues et autres chercheurs spécialisés sur les cultures des Premières Nations.
Il n’y a pas plus détestable qu’un scientifique qui, au terme de plusieurs années de recherche, se permet d’intimider un membre du peuple qu’il a étudié en le contredisant, en lui faisant face avec des savoirs acquis. C’est un geste plein d’arrogance. Et aucune bonne intention ne le justifie.
D’un autre côté. Il n’y a pas plus honorable que celui qui se tait et qui écoute, même devenu vieux et connaisseur. Conscient qu’il ne sait pas tout sur une culture étrangère. Que c’est impossible.
Il n’y a pas plus détestable qu’un scientifique qui, au terme de plusieurs années de recherche, se permet d’intimider un membre du peuple qu’il a étudié en le contredisant, en lui faisant face avec des savoirs acquis. C’est un geste plein d’arrogance. Et aucune bonne intention ne le justifie.
D’un autre côté. Il n’y a pas plus honorable que celui qui se tait et qui écoute, même devenu vieux et connaisseur. Conscient qu’il ne sait pas tout sur une culture étrangère. Que c’est impossible.
Ici, Shuni, le temps a la forme d’un cercle. Il évolue continuellement. Chacun suit le cercle du déroulement de sa vie. Comme les saisons se succèdent, se ressemblent. Dévoilant des parts cachées que nul ne soupçonnait.
Florent Vollant, lors d’une entrevue à la radio, traduisait littéralement le mot horloge : tipaipishimuan, le compteur de lunes. Il a ajouté en riant : On est très loin de la seconde.
Personne ne calcule le temps. Il est impossible d’en gagner. Ou d’en perdre. D’en manquer ou d’en garder. On ne peut le monnayer. Ou espérer le contrôler.
Personne ne te demandera l’âge que tu avais quand tu as fini tes études ni à quel moment tu as eu ton premier enfant.
Et puis, on ne juge pas quelqu’un s’il semble trop vieux pour entreprendre un projet audacieux. Le plus acclamé des finissants de niveau secondaire, je m’en souviendrai toujours, était celui qui à cinquante ans ne savait pas lire.
Ma petite sœur est tombée enceinte à quinze ans. Personne dans ma famille n’avait imaginé qu’elle deviendrait maman si jeune. Aujourd’hui, elle est mariée, a trois magnifiques enfants et a terminé ses études. Elle travaille dans un centre pour les victimes d’actes criminels. J’admire la rigueur avec laquelle elle entreprend de rendre accessibles les services judiciaires pour la communauté. Son petit Noah, qui termine sa deuxième année au primaire, est un élève surdoué. Je lui dis souvent que c’est une chance d’avoir un petit garçon talentueux pour les matières scolaires. Ou peut-être que ce n’est pas de la chance. Peut-être que lorsqu’on accepte son cercle, on accueille également la certitude qui nous permet de bâtir l’avenir, ce qu’on appelle la prospérité.
Le cercle est différent d’un système linéaire de temps dans lequel la vie est une course du point A, la naissance, au point B, la mort. Entre les deux, les études, la carrière, le couple, la maison, la famille, la retraite. Dans cet ordre.
Combien de fois par jour dois-je me faire ce rappel ?
La vie n’est pas une course.
Parce que marcher autour de sprinteurs invétérés, c’est difficile. Prendre son temps, accepter son propre cercle, et ne pas mourir d’envie devant les autres qui foncent droit devant eux. Tu peux imaginer à quel point c’est confrontant. Surtout maintenant. Surtout parce que mon Marcorel a tellement besoin de moi. C’est lui qui rythme mon cercle. Souvent. Il dit qu’il m’aime et mon cercle prend de l’ampleur.
Ce qu’il y a de rassurant avec le cercle, c’est qu’on peut revenir au même endroit autant de fois qu’on en a besoin. Reprendre le cours de ses études, un travail trop exigeant, une relation brisée. Revenir et être persuadé que cette lune-ci sera la bonne.
Florent Vollant, lors d’une entrevue à la radio, traduisait littéralement le mot horloge : tipaipishimuan, le compteur de lunes. Il a ajouté en riant : On est très loin de la seconde.
Personne ne calcule le temps. Il est impossible d’en gagner. Ou d’en perdre. D’en manquer ou d’en garder. On ne peut le monnayer. Ou espérer le contrôler.
Personne ne te demandera l’âge que tu avais quand tu as fini tes études ni à quel moment tu as eu ton premier enfant.
Et puis, on ne juge pas quelqu’un s’il semble trop vieux pour entreprendre un projet audacieux. Le plus acclamé des finissants de niveau secondaire, je m’en souviendrai toujours, était celui qui à cinquante ans ne savait pas lire.
Ma petite sœur est tombée enceinte à quinze ans. Personne dans ma famille n’avait imaginé qu’elle deviendrait maman si jeune. Aujourd’hui, elle est mariée, a trois magnifiques enfants et a terminé ses études. Elle travaille dans un centre pour les victimes d’actes criminels. J’admire la rigueur avec laquelle elle entreprend de rendre accessibles les services judiciaires pour la communauté. Son petit Noah, qui termine sa deuxième année au primaire, est un élève surdoué. Je lui dis souvent que c’est une chance d’avoir un petit garçon talentueux pour les matières scolaires. Ou peut-être que ce n’est pas de la chance. Peut-être que lorsqu’on accepte son cercle, on accueille également la certitude qui nous permet de bâtir l’avenir, ce qu’on appelle la prospérité.
Le cercle est différent d’un système linéaire de temps dans lequel la vie est une course du point A, la naissance, au point B, la mort. Entre les deux, les études, la carrière, le couple, la maison, la famille, la retraite. Dans cet ordre.
Combien de fois par jour dois-je me faire ce rappel ?
La vie n’est pas une course.
Parce que marcher autour de sprinteurs invétérés, c’est difficile. Prendre son temps, accepter son propre cercle, et ne pas mourir d’envie devant les autres qui foncent droit devant eux. Tu peux imaginer à quel point c’est confrontant. Surtout maintenant. Surtout parce que mon Marcorel a tellement besoin de moi. C’est lui qui rythme mon cercle. Souvent. Il dit qu’il m’aime et mon cercle prend de l’ampleur.
Ce qu’il y a de rassurant avec le cercle, c’est qu’on peut revenir au même endroit autant de fois qu’on en a besoin. Reprendre le cours de ses études, un travail trop exigeant, une relation brisée. Revenir et être persuadé que cette lune-ci sera la bonne.
Je crois moins au métissage des cultures qu’au reflet de soi dans l’autre. Le métissage comme un ensemble flou de pratiques culturelles prises ici et là qui parfois mènent les individus à renier leur héritage. J’aime la diversité que m’offrent le monde et les rencontres que je fais à travers les villes. J’observe comment ailleurs les gens vivent, se parlent, s’écoutent et se reconnaissent. Je m’attache à la différence, parce que par elle, je réalise les spécificités de ma culture. J’observe l’histoire du Québec et elle m’offre une voie que je peux suivre. Elle est un miroir qui diffuse l’image de ma réalité. Je me cramponne à cette histoire tout en sachant que la mienne est distincte.
Si l’amour de soi est la seule porte par laquelle une relation entre deux personnes peut être véritable. Alors, l’affirmation de sa culture précède l’ouverture à l’Autre.
Est-ce qu’un pays commun pourrait naître ? Bâti sur l’autodétermination des Premières Nations, le nationalisme québécois et néoquébécois. Je crois que c’est possible. Nous verrons peut-être le jour où nos deux histoires se rencontreront, pour la seconde fois. Et témoins d’une alliance égalitaire, comme le monde n’en aura jamais vu, un pouvoir politique réparti entre Autochtones et Québécois, nous nous souviendrons des erreurs du passé, pour ne pas les répéter. C’est ainsi nous honorerons la mémoire de nos ancêtres.
Si l’amour de soi est la seule porte par laquelle une relation entre deux personnes peut être véritable. Alors, l’affirmation de sa culture précède l’ouverture à l’Autre.
Est-ce qu’un pays commun pourrait naître ? Bâti sur l’autodétermination des Premières Nations, le nationalisme québécois et néoquébécois. Je crois que c’est possible. Nous verrons peut-être le jour où nos deux histoires se rencontreront, pour la seconde fois. Et témoins d’une alliance égalitaire, comme le monde n’en aura jamais vu, un pouvoir politique réparti entre Autochtones et Québécois, nous nous souviendrons des erreurs du passé, pour ne pas les répéter. C’est ainsi nous honorerons la mémoire de nos ancêtres.
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