lundi 30 septembre 2024

[Kern, Etienne] La vie meilleure

 



 

J'ai aimé

 

Titre : La vie meilleure

Auteur : Etienne KERN

Parution : 2024 (Gallimard)

Pages : 192

 

 

 

 

 

 

 

Présentation de l'éditeur : 

« Nous sommes la somme de nos amours. Et c’est la seule chose qui restera de nous. »
On l’a comparé à Gandhi, à Einstein, à Lénine. Des foules l’ont acclamé. Des milliardaires lui ont tapé sur l’épaule. Les damnés de la terre l’ont imploré. Aujourd’hui, son nom nous fait sourire, tout comme son invention : la méthode Coué.
Singulier destin que celui d’Émile Coué, obscur pharmacien français devenu célébrité mondiale, tour à tour adulé et moqué. La vie meilleure retrace l’histoire de ce précurseur du développement personnel qui, au début du XXᵉ siècle, pensait avoir découvert les clés de la santé et du bonheur. Un homme sincère jusque dans sa roublardise, qui croyait plus que tout au pouvoir des mots et de l’imagination.
Avec ce roman lumineux aux accents intimes, Étienne Kern rend hommage à ceux qui cherchent coûte que coûte une place pour la joie.

 

 

Le mot de l'éditeur sur l'auteur :  

Étienne Kern vit et enseigne à Lyon. Il est l’auteur aux Éditions Gallimard d’un roman, Les envolés, couronné en 2022 du Goncourt du premier roman et traduit dans plusieurs langues. 

 

 

Avis :

Son premier roman retraçait le parcours de Franz Reichelt, un inventeur si follement accroché à ses rêves qu’il mourait en 1912 de n’avoir su renoncer à tester contre toute raison son improbable costume-parachute. Etienne Kern s’intéresse cette fois à un autre « envolé », lui aussi et à la même époque à l’origine d’une idée dont on ne se souvient plus aujourd’hui que pour s’en moquer, visionnaire incompris ou mystificateur génial, l’on ne sait : Emile Coué.

Qui se souvient de la célébrité, en son temps, de ce pharmacien originaire de Troye qui, ayant découvert l’effet placebo, consacra sa vie à tenter d’améliorer celle de ses patients grâce à sa méthode fondée sur l’autosuggestion ? « Tous les jours, à tous points de vue, je vais de mieux en mieux. » Convaincu – à moins qu’il feignît de l’être ? - du pouvoir des mots mais aussi de l’écoute et de la sollicitude pour soutenir les malades en marge de leurs traitements habituels, il se fit le chantre de la pensée positive, au grand scepticisme du monde médical, et obtint des résultats parfois si surprenants que sa réputation fit bientôt le tour de la terre.

Alors, charlatan ou philanthrope ? Le portrait que dresse Etienne Kern laisse entière l’ambiguïté, préférant s’attacher à une autre question : qu’est-ce qui, en vérité, l’attire tant chez ce personnage et son histoire oubliée, dont on fait quand même assez rapidement le tour ? Et c’est un autre fil narratif, certes émouvant mais peut-être trop personnel et bateau pour passionner réellement, qui s’entremêle à la biographie, mettant en perspective la propre histoire de l’auteur, son impuissance face à la souffrance de proches et son application à réenchanter le monde par l’écriture.

Entre cette consistance relativement anecdotique et les résonances quasi feel good du récit, la délicatesse doucement mélancolique de la plume, à la fois légère et grave, a bien du mal à contrer le désappointement du lecteur après le beaucoup plus intéressant Les envolés. (3/5)

 

 

Citations :

Qu’a-t-il à leur offrir ? Pas de miracles, en vérité. Il n’en promet pas, d’ailleurs, il répète souvent ça : dans la limite du raisonnable. La Méthode ne guérit pas les cancers, ne répare pas les os. Elle vient en plus. Un paralytique retrouve ses jambes d’un coup ? C’est qu’il était déjà guéri, sans le savoir. Il s’était persuadé qu’il ne pouvait plus marcher. Une autosuggestion a remplacé l’autre.
La plupart des malades acceptent, ils comprennent. Qu’attendent-ils, au fond ? Ce que nous demandons aussi, peut-être, à nos guérisseurs de tout poil et, parfois, à nos médecins : un regard d’attention.
Quand ils repartent, tremblants encore, se prenant par le bras, plus légers, le monde est comme une joie. Ils y croient. Ils aimeraient pouvoir y croire.
C’est un courage déjà que d’essayer d’y croire.


Aller mieux.
Aller mieux dans sa tête, dans son corps. Aller mieux de jour en jour. La vie comme longue convalescence. La fin des pesanteurs. Le temps qui se retourne : demain mieux qu’hier. Demain sans vieillir. Demain sans la mort qui s’avance d’un jour en plus.
Ils ont cet espoir-là. Ce désir vieux comme le monde. La veille, dans un journal, sur une affiche, ils ont vu ce petit homme rose qui, soudain, lui a prêté son visage. Alors les voilà, en file, lourds de leurs rêves, avec leurs mains jointes, leurs corps voûtés, tout ce qui vacille en eux. Ils viennent pour voir. Ils viennent pour croire.
Suis-je si différent d’eux ? Ils attendent, ils espèrent. J’écris. C’est pareil. C’est fuir. C’est se mentir. C’est regarder le monde, le grand réel vide et creux, et lui donner de beaux habits, le colorer de mots, tout miser sur ces mots.
Écrire, c’est cesser d’affronter. C’est l’aveuglement heureux. C’est une joie qu’on s’invente.
La vie meilleure.


On ne regarde jamais assez tant qu’il est temps. On se dit que les choses seront là pour toujours, sous nos yeux. Il faut qu’elles soient finies pour comprendre comme elles nous échappent et comme elles nous manquent. Et il faut qu’elles soient finies depuis longtemps pour comprendre ça, aussi : c’est parce qu’elles finissent qu’elles sont belles.

 

 

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