samedi 12 décembre 2020

[Bonnefoy, Miguel] Héritage

 



 

J'ai beaucoup aimé

 

Titre : Héritage

Auteur : Miguel BONNEFOY

Parution : 2020 chez Rivages

Pages : 256

 

 

 

 

 

 

 

Présentation de l'éditeur :  

La maison de la rue Santo Domingo à Santiago du Chili, cachée derrière ses trois citronniers, a accueilli plusieurs générations de la famille des Lonsonier. Arrivé des coteaux du Jura avec un pied de vigne dans une poche et quelques francs dans l’autre, le patriarche y a pris racine à la fin du XIXe siècle. Son fils Lazare, de retour de l’enfer des tranchées, l’habitera avec son épouse Thérèse, et construira dans leur jardin la plus belle des volières andines. C’est là que naîtront les rêves d’envol de leur fille Margot, pionnière de l’aviation, et qu’elle s’unira à un étrange soldat surgi du passé pour donner naissance à Ilario Da, le révolutionnaire.
Bien des années plus tard, un drame sanglant frappera les Lonsonier. Emportés dans l’oeil du cyclone, ils voleront ensemble vers leur destin avec, pour seul héritage, la légende mystérieuse d’un oncle disparu.
Dans cette fresque éblouissante qui se déploie des deux côtés de l’Atlantique, Miguel Bonnefoy brosse le portrait d’une lignée de déracinés, dont les terribles dilemmes, habités par les blessures de la grande Histoire, révèlent la profonde humanité.
 
  

Le mot de l'éditeur sur l'auteur :

Miguel Bonnefoy est l’auteur de deux romans très remarqués, Le Voyage d’Octavio (Rivages poche, 2016) et Sucre noir (Rivages poche, 2019). Ils ont tous deux reçu de nombreux prix et été traduits dans plusieurs langues.

 

 

Avis :

Chassé du Jura par le phylloxera, Lonsonier s’embarque pour la Californie avec son dernier cep de vigne. C’est finalement au Chili qu’il trouve à replanter ses racines. Lui succèderont trois générations d’une famille qui restera toujours profondément attachée à ses origines françaises, devenues au fil du temps quasi mythiques. Au travers de chacune des deux guerres mondiales puis depuis les geôles de Pinochet, fils, petite-fille et arrière petit-fils vivront chacun dans leur chair cet indéfectible attachement qui, inexorablement, modèlera leur destinée, pour le meilleur comme pour le pire.

Sa brochette de personnages, au pittoresque quasi surréaliste, donne à cette histoire une coloration originale et inoubliable. C’est dans un émerveillement tendre et amusé que le lecteur s’attache tour à tour au Maestro qui débarque de France avec les instruments d’une fanfare entière et initie tout un village à la musique, à Lazare le Poilu revenu des tranchées avec un fantôme, à Thérèse l’ornithophile qui vit pour sa fantastique volière, à Margot l’intrépide aviatrice prête à tout pour voler, à Ilario Da le révolté pro-Allende, sans oublier le mystérieux chaman mapuche Aukan qui traverse le récit comme pour souligner la magique fatalité qui semble gouverner leur existence à tous.

Le fil rouge qui lie ces personnages est leur dualité d’exilés et les dilemmes qu’elle engendre, au travers d’un héritage au contour flou et fantasmatique mais qui ne cesse d’infléchir leurs destins individuels : les racines qui les attachent à la France, comme un atavisme contre lequel il est vain de lutter, une attraction magnétique et magique à laquelle obéissent d’ailleurs jusqu’aux concours de circonstances, tels les involontaires changements de patronymes qui encadrent comme deux coups de clap le départ de Lonsonier et le retour d’Ilario Da.

Le terrible séjour de ce dernier dans les geôles de Pinochet, rédigé d’après le récit des tortures subies par le père de l’auteur avant sa fuite pour la France, constitue sans doute le point culminant du roman, en tout cas l’ultime point de rupture qui fera se refermer la boucle du curieux destin de cette famille.  

Cette saga qui, par un vrai tour de force, ne tient qu’en deux cents pages, est une petite merveille savamment ciselée, qui, de rêves enthousiastes en confrontations traumatisantes aux grands drames du siècle dernier, nous conte l’exil, le déracinement, et l’indéfectible lien aux racines. (4/5)

 

 

Citations : 

Il le dit comme on donne de l’eau à un autre homme, non pas parce qu’on en a, mais parce qu’on connaît la soif.

Ils voulaient construire un moulin alors qu’ils interdisaient le vent.

 

 

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