J'ai beaucoup aimé
Titre : Turbulences
(Guéver nikkhnas bapardès)
Auteur : Eshkol NEVO
Traduction : Jean-Luc Allouche
Parution : 2021 en hébreu,
2024 en français (Gallimard)
Pages : 336
Présentation de l'éditeur :
Une lune de miel en Amérique du Sud tourne au cauchemar. Un médecin-chef
d’un hôpital de Tel-Aviv se sent étrangement proche d’une jeune femme
de son service jusqu’à éprouver le besoin impérieux de la protéger. Un
couple marié a pour habitude de se promener le samedi matin dans un
verger à la périphérie de la ville, mais lorsque l’homme entre pour un
instant dans le jardin, il disparaît sans laisser de traces.
Trois histoires d’amour turbulentes et non conventionnelles s’entrecroisent et nous plongent dans l’énigme qui se trouve au cœur de toute intimité. Sans délaisser l’ironie si caractéristique de son écriture, Eshkol Nevo fouille les relations humaines en utilisant habilement les mécanismes du thriller.
Trois histoires d’amour turbulentes et non conventionnelles s’entrecroisent et nous plongent dans l’énigme qui se trouve au cœur de toute intimité. Sans délaisser l’ironie si caractéristique de son écriture, Eshkol Nevo fouille les relations humaines en utilisant habilement les mécanismes du thriller.
Le mot de l'éditeur sur l'auteur :
Eshkol Nevo, né en 1971, travaille et vit avec sa femme et ses enfants près de Tel-Aviv. Tous ses romans ont paru aux Éditions Gallimard. Publié dans le monde entier, acclamé par la critique et le grand public dans son pays, Eshkol Nevo est aujourd’hui considéré comme l’une des voix les plus originales de la scène littéraire internationale.
Avis :
Ne serions-nous qu’ambivalences, Janus aux contiguïtés équivoques toujours prêtes à nous faire basculer malgré nous dans la noirceur de drames aussi complexes que sournois ? En trois courtes histoires unies par un lien ténu, l’auteur israélien peint doutes, contradictions et déchirements intimes craquelant si bien la banalité quotidienne que la vie ressemble à un champ miné plus ou moins consciemment par nos propres actes.Comme pris au hasard dans une foule où ils se croisent sans se connaître, l’un simple figurant dans le récit de l’autre, trois narrateurs israéliens, secoués par les événements qu’ils ont malgré eux aidés à faire chavirer leur vie, se livrent chacun à une sorte de confession, hagarde et douloureuse, de rescapés meurtris affrontant leur part de responsabilité avec une lucidité souvent toute relative. Un quadragénaire fraîchement divorcé ne parvient toujours pas à admettre la terrible manipulation à laquelle, aveuglé par son désir d’amour, il s’est laissé prendre. Un médecin-chef vieillissant accusé de harcèlement sexuel continue à se persuader du caractère protecteur de son attachement à une jeune interne. Une femme cherche dans le passé ce qui pourrait expliquer la disparition de son mari, mystérieusement volatilisé au cours d’une promenade.
Avec pour ressorts suspense et angoisse, savamment entretenus dans le développement de ces faits divers dramatiques où les narrateurs s’observent rétrospectivement s’empêtrer dans leurs irrépressibles erreurs, leur raison si bien dépassée par leurs désirs que même a posteriori, et contre les évidences, la clairvoyance leur fait encore partiellement défaut, ces tranches de vie parallèles sont semblablement parcourues par les courants souterrains qui, serpentant dans nos inconscients, transforment nos vies en dangereux culs-de-grève susceptibles de s’effondrer à tout moment.
C’est ainsi qu’une fois assemblées, ces trois histoires qui, séparément, pourraient n’être considérées que sous l’angle du thriller, la dernière teintée d’onirisme fantastique, dessinent en filigrane une sorte de peinture sociale, traversée d’ironie et d’inquiétude, qui, faisant écho à d’autres ouvrages récents d’auteurs israéliens, comme Stupeur de Zeruya Shalev, vient elle aussi souligner combien la société israélienne vit de tensions profondes.
Un livre troublant et brillant, où les déboires intimes et individuels, vécus dans l’incrédulité et le déni, révèlent entre les lignes le désarroi né des turbulences de l’histoire collective israélienne. (4/5)
Citations :
Le monde se partage en deux catégories d’individus : ceux qui ont des enfants. Et ceux qui n’en ont pas. Et seule une femme qui n’a pas d’enfants était capable de demander à quelqu’un qui en a de se mettre en danger en sa faveur, de cette façon.
Je me suis dit que, dans le regard d’Orna, surtout pendant les dernières années, je voyais toujours ce que je n’étais pas. Et dans celui de Mor, je découvrais ce que j’étais réellement. Or, un homme devient, avec le temps, ce qu’on perçoit en lui.
« Certains parents aiment leurs enfants de bas en haut, et d’autres de haut en bas. » Autrement dit, certains parents désirent d’abord calmer leurs propres angoisses, et ce n’est que lorsqu’ils sont rassurés qu’ils peuvent se sentir libres de s’émerveiller de leurs enfants. Et d’autres qui ont besoin avant tout de s’émerveiller de leurs enfants, et ce n’est qu’alors qu’ils sont prêts à voir ce qui cloche tout de même.
La musique est l’appât au bout de la gaule plongée dans les tréfonds de notre âme, qui en fait remonter tout ce qui est noyé.
Je me suis dit que, dans le regard d’Orna, surtout pendant les dernières années, je voyais toujours ce que je n’étais pas. Et dans celui de Mor, je découvrais ce que j’étais réellement. Or, un homme devient, avec le temps, ce qu’on perçoit en lui.
« Certains parents aiment leurs enfants de bas en haut, et d’autres de haut en bas. » Autrement dit, certains parents désirent d’abord calmer leurs propres angoisses, et ce n’est que lorsqu’ils sont rassurés qu’ils peuvent se sentir libres de s’émerveiller de leurs enfants. Et d’autres qui ont besoin avant tout de s’émerveiller de leurs enfants, et ce n’est qu’alors qu’ils sont prêts à voir ce qui cloche tout de même.
La musique est l’appât au bout de la gaule plongée dans les tréfonds de notre âme, qui en fait remonter tout ce qui est noyé.
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