mercredi 5 mars 2025

[Baqué, Joël] L'été indien

 



 

J'ai aimé

 

Titre : L'été indien

Auteur : Joël BAQUE

Parution : 2024 (P.O.L.)

Pages : 160

 

 

 

 

 

 

 

Présentation de l'éditeur : 

Éric Planchon naît dans un village de l’Hérault des années soixante-dix. Son père est un vigneron amoureux de ses ceps ; sa mère, déçue par son mariage, se réfugie dans une inquiétante passion amoureuse pour le présentateur du journal télévisé Jean-Pierre Pernaud, et un non moins inquiétant intérêt pour le tri sélectif des déchets. Élevé dans cette atmosphère électrique où il apprendra à cultiver des qualités diplomatiques, Éric rencontrera d’autres personnages hauts en couleur lors de son service militaire, de son premier travail dans un restaurant pour touristes, puis dans une compagnie d’assurances. Il subira Bousillot, un gradé hargneux, connaîtra l’étonnant « Termite de Dieu », l’aumônier du régiment devenu fou. Embauché comme saisonnier au Cerf Radieux, un restaurant du Cap d’Agde, il sera initié aux ficelles du métier par son patron, Bridet, ancien champion de lancer du poids, et, sans succès, à celles de la drague par Jérôme, le cuisinier. Sa première expérience amoureuse se nouera dans les locaux des Assurances de l’olivier avec une collègue, Sylvie, mais pâtira de leurs premières vacances dans les sentiers périlleux des Pyrénées. L’amour non exprimé qui le liait à ses parents lui apparaîtra alors dans des circonstances inattendues, à la fois graves et loufoques.

L’été indien, c’est le roman d’une France proche mais souvent invisibilisée et déjà lointaine, que Joël Baqué a évoquée dans son merveilleux La mer c’est rien du tout. Roman loufoque d’apprentissage, autant que roman de critique sociale, absurde et tendre. L’humour, omniprésent, ravageur, s’enveloppe parfois d’un léger voile de nostalgie.

 

 

Le mot de l'éditeur sur l'auteur :   

Né en 1963 à Béziers, Joël Baqué vit à Nice.

 

 

Avis:   

Huit ans après « La mer c’est rien du tout », Joël Baqué revient à nouveau sur les traces de son enfance dans un roman où, forçant le trait, l’humour le dispute à la nostalgie.

Eric Planchon a grandi dans l’Hérault pendant les années 1970, entre une mère au foyer meublant son ennui de son obsession pour le tri sélectif et de sa passion pour le JT de Jean-Pierre Pernault, et un père de cette « race de vignerons maussades en accord avec une terre caillouteuse, sableuse, qui demande beaucoup d’efforts et donne peu » : un tandem si frictionnel que surnommé au village le « couple tragique » et responsable chez son unique fils de l’habitude de servir de « variable d’ajustement », de pratiquer en expert « l’art subtil des alliances de revers et double jeux » et surtout de ne jamais « se trouver en position de trancher ».

C’est avec pour principal bagage ce talent pour la neutralité que le jeune homme s’élance vers son indépendance, d’abord pour un job d’été dans un restaurant du Cap d’Agde, puis au service militaire, enfin en décrochant un emploi dans une compagnie d’assurances. Des arnaques de la restauration pour touristes aux brimades d’un gradé despotique en passant par les râteaux amoureux du narrateur, une galerie de portraits savoureux et truculents, tous de petites gens ordinaires dessinant une France profonde, modestement invisible, une France des « fins de mois en toboggan » et d’une « immense majorité [qui] sourit avec les moyens du bord ou ne sourit pas », prend alors vie sous une plume inimitable, magnifique de tournures et de trouvailles, cachant, sous son humour et sa loufoquerie de façade, la pudeur et la délicatesse d’un amour resté inexprimé, faute de mots et d’effusions, entre un fils et ses parents désormais disparus.

Passée ce qui pourra parfois paraître la barrière d’une franche loufoquerie, une comédie sociale profondément juste, servie par une écriture superbe et une émotion tendrement nostalgique. (3,5/5)

 

 

Citation :

Il marchait à pas lourds, traversé de souvenirs jusqu’alors restés sous la surface de flottaison. La plupart étaient sans intérêt, d’autres picotaient. C’était curieux, ces souvenirs se rappelant à lui tels des créanciers ayant su attendre leur heure.


 

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