dimanche 27 octobre 2019

[Spitzer, Sébastien] Le coeur battant du monde





 

J'ai beaucoup aimé

Titre : Le coeur battant du monde

Auteur : Sébastien SPITZER

Année de parution : 2019

Editeur : Albin Michel

Pages : 448






 

 

Présentation de l'éditeur :

Dans les années 1860, Londres, le cœur de l’empire le plus puissant du monde, se gave en avalant les faibles. Ses rues entent la misère, l’insurrection et l’opium. Dans les faubourgs de la ville, un bâtard est recueilli par Charlotte, une Irlandaise qui a fui la famine. Par amour pour lui, elle va voler, mentir, se prostituer sans jamais révéler le mystère de sa naissance.

L’enfant illégitime est le fils caché d’un homme célèbre que poursuivent toutes les polices d’Europe. Il s’appelle Freddy et son père est Karl Marx. Alors que Marx se contente de théoriser la Révolution dans les livres, Freddy prend les armes avec les opprimés d’Irlande.


Après Ces rêves qu’on piétine, un premier roman très remarqué et traduit dans plusieurs pays, qui dévoilait l’étonnante histoire de Magda Goebbels, Sébastien Spitzer prend le pouls d’une époque où la toute-puissance de l’argent brise les hommes, l’amitié et l’espoir de jours meilleurs.


Le mot de l'éditeur sur l'auteur :

Sébastien Spitzer est l’auteur d’un premier roman, Ces rêves qu’on piétine, traduit dans plusieurs pays et couronné par de nombreux prix littéraires.


Avis :

Dans les bas-fonds du Londres du milieu du 19ème siècle, un nourrisson est recueilli et adopté par Charlotte, jeune Irlandaise chassée de son pays par la famine. L’enfant s’appelle Freddy. Il ne découvrira que bien plus tard qu’il est le fils naturel de Karl Marx, lui aussi réfugié dans la capitale anglaise après avoir été refoulé de Prusse et de Paris. Pendant que le père rédige Le Capital tout en maintenant des habitudes bourgeoises aux crochets de son ami, le riche industriel Engels, Freddy grandit dans la misère, participe aux soulèvements populaires lors de la crise du coton provoquée par la guerre de Sécession américaine, et se retrouve aux côtés des nationalistes irlandais par dévotion pour sa mère adoptive.

Karl Marx a bien eu un fils naturel, Frederick, né en 1851 d’une relation avec la bonne de la famille, et reconnu par Friedrich Engels. A partir de ce fait réel, l’auteur a librement imaginé la vie de Freddy et de sa nourrice, en faisant les personnages principaux d’une vaste fresque historique où tout, à part eux, est véridique.


On y découvre ainsi l’essor de l’industrie du coton en Angleterre et la misère ouvrière qui provoque de plus en plus d’insurrections, l’impact de la guerre de Sécession américaine sur l’économie anglaise, le sort des Irlandais après la Grande Famine et la déception de ceux qui se sont engagés auprès des Yankees dans l’espoir de se voir attribuer une terre, l’action des fenians et la violente répression anglaise…, mais surtout, en un contrepoint saisissant, les portraits étonnants de deux personnages déconcertants : Karl Marx et Engels, révolutionnaires bourgeois aux multiples contradictions.

Renforcé par le style d’écriture aux phrases courtes et sèches, le suspense autour du sort de Freddy est constant et maintient éveillé l’intérêt du lecteur du début à la fin de cette petite histoire enchâssée dans la grande, construite de manière crédible et passionnante à partir d’un fait méconnu, dans un foisonnement historique qui permet de saisir l’étonnante saveur des personnages de Marx et d’Engels. Un très bon moment de lecture, mêlant utilement l’intérêt à l’agrément. (4/5)



Citations :

Charlotte butine parmi les sacs et les caisses pleines de fruits. Elle prend un plaisir fou à mépriser les prix, les poids qui font toujours pencher la balance du côté du plus cher.
« Un sachet de raisins secs.
– Oui, madame. »
Elle commande, sans compter. Mais ce qui lui fait le plus de bien, ce ne sont pas ces sacs qui s’empilent sur le comptoir pour elle. Ce qui l’enorgueillit, c’est qu’on l’appelle « madame ». Charlotte en rajoute pourvu qu’on le dise encore.
« Vous avez de cette pâte de curry qui vient des Indes ?
– Oui, madame.
– Et du beurre salé ?
– Oui, madame. »
Leu Phong revient avec du beurre et un pot de curry qu’il ouvre comme s’il s’agissait d’un trésor.
« Voilà, madame. »
Charlotte n’a pas fini. Mais un détail l’intrigue. 

« Votre madame, monsieur Phong, est-ce que vous le dites avec une majuscule ?
– Pardon ? »
Charlotte se penche vers lui.
« Quand vous me dites “madame”, vous le pensez comment ? Avec une majuscule ? »
Leu Phong exécute un rapide calcul mental. Puis il ajuste sa veste et sort une paire de gants blancs.
« Bien sûr, chère Madame. »
Charlotte éclate de rire. Elle rêve du jour où tout le monde mettra des gants pour elle, où on lui offrira des bouquets de Madame, avec ou sans curry, amandes ou sucre en poudre, et ce serait mieux encore s’il n’y avait rien à vendre, à acheter ou à prendre. 


Du même auteur sur ce blog :

 





La Ronde des Livres - Challenge 
Multi-Défis d'Automne 2019

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire