mardi 28 mai 2019

[Tanette, Sylvie] Un jardin en Australie






Coup de coeur 💓

Titre : Un jardin en Australie

Auteur : Sylvie TANETTE

Année de parution : 2019

Editeur : Grasset

Pages : 180








 

Présentation de l'éditeur :   

Quelque part vers le centre de l’Australie, la cité minière de Salinasburg s’étale en bordure du désert. Tout au bout, une petite maison de bois se cache dans un jardin à l’abandon. Deux femmes se racontent depuis cet endroit que les Aborigènes nommaient « le lieu d’où les morts ne partent pas ».
 
Tout commence dans les années 30. Ann, née dans la bonne bourgeoisie de Sydney, choisit contre l’avis de sa famille de suivre son mari aux confins du désert. Elle aura toute sa vie le projet fou d’y faire pousser un parc luxuriant. Soixante-dix ans plus tard, une jeune Française, Valérie, dirige un festival d’art contemporain dans la même région reculée. Sur un coup de coeur, elle s’installe dans une maison décrépie mais envoûtante, entourée de plantations désormais  délaissées. Valérie est très inquiète pour sa petite fille Elena. A trois ans, Elena ne se décide pas à parler. Après sa mort solitaire, Ann veille secrètement sur ce qui reste de son jardin et sur ses nouveaux habitants....
 
Si éloignées, si dissemblables, Ann et Valérie affrontent toutes deux l’adversité et trouvent un vrai réconfort là, au bout du monde. Et bien qu’elles ne puissent se connaître ni même se croiser, elles se rencontrent par-delà les années dans cet envoûtant coin de verdure. Un havre de liberté. Un jardin à soi.



Le mot de l'éditeur sur l'auteur :

Sylvie Tanette est critique littéraire aux Inrocks et à la Radio suisse romande. Elle a publié un premier roman, Amalia Albanesi, en 2011 (Mercure de France).



Avis :

Dans les années trente, une jeune femme, Ann, rompt avec sa famille et la bourgeoisie de Sydney pour suivre son mari aux confins du désert, au centre de l’Australie. Tout autant rejetée par sa belle-famille d’origine irlandaise, elle tente de s’épanouir en faisant pousser un jardin en bordure du bush. Soixante-dix ans plus tard, une autre jeune femme, Valérie, également en rupture avec les siens, vient s’établir dans une maison désormais délabrée dont elle décide de ressusciter l’incongru jardin à l‘abandon : elle finira par découvrir l’histoire de l’ancienne habitante, Ann, dont l’ombre continue de hanter les lieux.

Chacune à leur époque, Ann et Sylvie sont deux femmes que leur volonté d’indépendance place à contre-courant de leur famille et de la société. Toutes deux vont s’accrocher à leurs choix de vie, à leurs valeurs et à leur liberté, dont le plus fort symbole est ce jardin qu’elles tentent inlassablement de conquérir, dans un combat inégal contre la sécheresse et la poussière rouge du bush australien, et qui les fait passer pour de folles originales.

La symbolique de cette transmission entre deux femmes séparées par deux générations et qui ne se sont jamais connues, la plus ancienne défrichant un chemin que la suivante continue à tracer, est poétique et émouvante. C’est un hommage au courage, un encouragement à ne pas se laisser dérouter de sa trajectoire malgré les écueils. De chaque lutte reste toujours quelque chose, qui pavera la voie de celui qui tôt ou tard finira par reprendre le flambeau. Ainsi, en se battant pour la reconnaissance de la culture aborigène, Valérie s’inscrit sans le savoir dans une lignée de femmes à la mentalité de pionnières, de celles qui font bouger les lignes, comme Ann lorsqu’elle se rebella contre la condition des femmes de son époque et de son milieu.

Dès l’introduction, je me sentie sous le charme de la jolie et envoûtante écriture de ce conte poétique et touchant, riche d’une profonde symbolique, et occasion d’un superbe voyage dans le bush australien, à la rencontre notamment de l’âme aborigène. Coup de coeur. (5/5)




Le coin des curieux :

Dans Un jardin en Australie, Valérie tente de promouvoir l'art aborigène contemporain.

L’art, qu’il soit antérieur à la colonisation australienne ou contemporain, est un élément clé dans la culture aborigène. Il est avant tout l’expression d’une spiritualité. Chaque œuvre - peinture, gravure sur bois, sculpture, costume de cérémonie, décoration sur un outil ou une arme – est liée à un territoire, une route, un lieu…, dont elle ranime l’esprit créateur ancestral.

En effet, les Aborigènes célèbrent, chantent, dansent, miment et peignent pour réactiver l’énergie créatrice de l'esprit ancestral à l’origine d’un lieu topographique. Cette énergie leur sera nécessaire pour faire face aux évènements historiques perturbants. Les esprits ancestraux peuvent alors communiquer par rêves aux vivants et leur insuffler de nouveaux rituels, chants, danses, peintures, qui viennent rejoindre l'énorme réservoir d'inspiration que constitue le « Temps du Rêve », ce temps mythique qui explique les origines de leur monde, de l’Australie et de ses habitants.

Un formidable exemple en est la création de l’École artistique de Warmun dans le Kimberley, qui permit aux Aborigènes d'exorciser le souvenir des massacres impunis perpétrés à leur encontre par les éleveurs blancs du Kimberley.

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