dimanche 17 juillet 2022

[Uzun, Maryna] Le voyage impaisible de Pauline

 



 

J'ai aimé

 

Titre : Le voyage impaisible de Pauline

Auteur : Maryna UZUN

Parution : 2014 (Les 2 Encres)

Pages : 256

 

 

 

 

 

 

 

Présentation de l'éditeur :  

Étudiante, Pauline quitte la ville de Kharkov en Ukraine pour se présenter à un concours de danse au Conservatoire de Paris. Elle échoue et rencontre par hasard Tom, intermittent du spectacle, avec lequel elle noue très rapidement une relation amoureuse. Pia, collègue secrètement amoureuse de Tom, en est jalouse.
Un roman empreint d'un charme fou, où naît une poésie issue elle-même de l'originalité d'une écriture que nous transmet l'âme ukrainienne de l'auteure.

 

Le mot de l'éditeur sur l'auteur : 

Née à Odessa (Ukraine), Maryna Uzun vit en France depuis 1997. Elle est pianiste concertiste, lauréate de la Fondation Cziffra et enseigne le piano classique à Prizma. Elle a appris le français en autodidacte et par amour. Un de ses textes a été retenu pour l’anthologie Le goût d’Odessa (2005, Mercure de France).

 

Avis :

Recalée au concours de danse du Conservatoire de Paris qui lui a fait entreprendre le coûteux voyage depuis sa ville de Kharkov, en Ukraine, la jeune Pauline concrétise pourtant un autre rêve, plus secret celui-là, lorsque le hasard la met sur le chemin de Tom, intermittent du spectacle, et que leur coup de foudre suivi d’un mariage express lui ouvre définitivement les portes de la France, ce pays qu’elle idéalise. Une vie de bohème heureuse commence pour le jeune couple, qui n’en a toutefois pas fini avec les coups du sort, cette fois implacablement dramatiques.

Sous ses dehors de romance légère qui narre les faits sans s’y appesantir, comme l’on regarderait à travers une vitre le défilement d’une vie, ce récit rédigé au passé, sur un ton globalement enjoué et comme détaché, prend une toute autre saveur quand une des épigraphes du livre, « Je n’ai pas fait un autoportrait, j’ai photographié mon ombre », et quelques proximités troublantes entre le parcours de Pauline et celui de l’auteur, viennent jeter un doute tenace dans l’esprit du lecteur : jusqu’à quel point l’ombre de Maryna, en couverture, se confond-elle avec celle de son personnage ?

Dès lors, les imperfections-mêmes du récit, il est vrai à première vue sans profondeur véritable, finissent par rendre plus touchante la narration sobrement contenue dans une sorte de prudente mise à distance. L’émotion est bien là, à se laisser deviner. Ou plutôt, elle ne transparaît que désormais tenue en laisse, dans un parcours marqué par la résilience, caractéristique de tant de ces vies slaves habituées à bannir l’auto-apitoiement dans les épreuves auxquelles elles ont à faire face depuis des générations. 

C'est ainsi qu'en quelque sorte note de fond du roman, l’émotion se retrouve presque masquée par la note de tête légère et fraîche d’un récit plein de vivacité, piqué des mille observations d’une jeune femme qui découvre avec sensibilité les différences culturelles entre la France et l’Ukraine, confrontant ses rêves à la réalité, s’appliquant à l’apprentissage d’une langue dont elle connaît alors mieux les citations de grands écrivains que les expressions quotidiennes, le tout avec une spontanéité pleine de poésie et de bonne humeur qui font tout le charme d’une écriture parfois joliment décalée, émaillée de petites inexactitudes involontaires comme de trouvailles judicieusement imagées.
 
L’on referme alors ce livre sur une note de coeur, pris d’affection pour la sincérité simple et courageuse d’un récit que l’on aurait tort de réduire à une simple romance un peu superficielle. (3,5/5)

 

 

Citations : 

Je me sentais étrangère dans mon pays natal et je l'ai quitté pour finalement me sentir ukrainienne à l'étranger.En pratique, la vie n’était pas un concours d’entrée, mais un concours de circonstances.

Elle allait toujours de l'avant, sans jamais se retourner. C'était la devise des têtes brûlées, mais aussi une devise prolétaire.

« Si les hommes ne dansaient pas sur les volcans, je me demande où et quand ils danseraient ; l’important est de bien savoir qu’on a le volcan sous les pieds afin de goûter son vrai plaisir d’homme libre. » (Jacques Perret)

En russe, on dit « on l’a donnée à la danse » et pas « on l’a mise à la danse ». En pensant à cela, Pauline se dit que c’était comme si, dans une famille pieuse, on donnait un enfant à l’église !

La nuit tomba très vite. Ils apercevaient les lumières électriques des trois tours voisines. Il n’y avait qu’une succession serrée de fenêtres, sans transition, et chaque fois on voyait des scènes différentes dans des familles différentes : un vieux lavait son assiette et, juste derrière le mur, quelqu’un installait son enfant sur sa chaise haute. Il n’y avait pas de rideaux qui pouvaient empêcher de tout voir. C’était comme une planche contact de l’époque où on avait des films à développer !

 

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