jeudi 21 juillet 2022

[Pasolini, Pier Paolo] L'Odeur de l'Inde

 



 

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Titre : L'Odeur de l'Inde
            (L'Odore dell' India)

Auteur : Pier Paolo PASOLINI

Traduction : René de CECCATTY

Parution : en italien en 1962,
                  en français en 1984 (Folio)
                  et 2020 (Denoël)

Pages : 144

 

 

 

 

 

Présentation de l'éditeur :  

En 1961, Pier Paolo Pasolini se rend en Inde. Une découverte bouleversante de la terre sacrée, foulée pour la première fois au côté des romanciers Elsa Morante et Alberto Moravia. Le prestigieux trio italien chemine ainsi entre Bombay, Calcutta, Delhi et Bénarès.
Pasolini rapporte de ce voyage des écrits singuliers qui mêlent anecdotes, errances et réflexions sociologiques. Il y a d’abord l’émerveillement face à la beauté, la douceur de l’Inde, ses rencontres, et puis vient, très vite, l’épouvantable misère. Pasolini, intellectuel engagé, s’insurge, ne pouvant s’empêcher de tracer des parallèles entre ce système et celui de son pays natal.
Au-delà du carnet de voyage qui révèle un regard, une sensibilité, une vision de l’autre et du monde, L’Odeur de l’Inde dessine l’autoportrait en creux d’un homme face à une humanité qui le fascine et le dépasse.
René de Ceccatty, grand spécialiste de Pier Paolo Pasolini et traducteur émérite de l’italien, fait revivre dans une préface éclairante la genèse de ce récit puissant et interroge son influence sur l’œuvre du cinéaste-écrivain.

 

 

Le mot de l'éditeur sur l'auteur : 

Pier Paolo Pasolini est né le 5 mars 1922 à Bologne. Fils d'officier, il ne cesse toute sa jeunesse de passer de ville en ville : Bologne, Parme, Belluno, Crémone, Reggio nell'Emilia, puis Bologne encore où il fréquente l'université. En 1943, il doit partir pour Casarsa, dans le Frioul, le pays de sa mère, où il restera jusqu'en 1949. C'est là qu'il commence à écrire. Il s'établit ensuite à Rome, dernière adaptation à un milieu nouveau – celui du peuple romain et du sous-prolétariat des faubourgs. Il y dirige ensuite la revue Nuovi argomenti avec Alberto Moravia qui le considérait, dès la fin des années 50, comme le plus grand poète italien de sa génération.
Auteur de poèmes, de romans, de récits, de traductions libres de Plaute et d'Eschyle, Pasolini, qui avait collaboré à de nombreux scénarios, est devenu réalisateur relativement tard : entre Accatone (1961) et Salo ou Les Cent Vingt Journées de Sodome, il aura réalisé dix-huit films. Il est mort le 2 novembre 1975, assassiné par un voyou dans un terrain vague de la banlieue romaine.

 

 

Avis :

En 1961, invité à la commémoration du poète Tagore, Pasolini se rend en Inde en compagnie des écrivains Alberto Moravia et Elsa Morante. Pendant que ses « collègues » rentrent sagement à l’hôtel le soir, lui, appelé par « l’odeur de l’Inde », déambule dans la nuit à la rencontre de ces hommes et de ces femmes qui, par milliers, dorment à même les trottoirs et le long des plages.

Ses rencontres furtives avec la misère, limitées par l’incompréhension de la langue, le fascinent autant qu’elles l’épouvantent. Alors, tandis que, ne connaissant rien ou presque de la société indienne, il s’accroche désespérément à ses références européennes pour ne pas perdre tout à fait pied face au choc, submergé malgré tout par un tsunami d’impressions et d’émotions où surnagent révolte et compassion, il tente tant bien que mal, non sans naïveté et parfois même à l’emporte-pièce, d’analyser ce qu’il perçoit des mœurs du pays.

Il s’interroge ainsi sur les raisons du système de castes, s’étonne de ce qu’il croit voir de tolérance à la diversité religieuse, s’insurge contre le snobisme de la bourgeoisie montante locale, enfin égratigne ce qui lui semble d’immobilisme chez Nehru tout en se félicitant des initiatives de Soeur Teresa. Et si clairement l’Inde l’impressionne et l’envoûte, sa quête d’explications ne se départit jamais d’une certaine forme de refus critique. S’y reflète sans doute l’esprit d’un écrivain qui ne donna jamais dans la tiédeur ni dans la résignation, mais s’engagea toujours résolument dans un combat semé de polémiques, liées à la radicalité de ses idées.

Moravia, qui relata ce même voyage dans Une certaine idée de l’Inde, déclara : C'est un pays d'une originalité extrême, un pays qui contraint le voyageur à prendre position. Pour ma part, cela consiste à accepter sans m'identifier ; pour Pasolini - et on peut le dire de toute sa vie - il s'agissait de s'identifier sans accepter vraiment. Dans la confrontation à ce sous-continent dont on dit que personne ne revient indemne, c’est donc tout autant un certain visage du grand écrivain italien, qu’une vision particulière de l’Inde, que nous fait découvrir son récit de voyage. (4/5)

 

 

Citation :

Chaque fois qu’en Inde on laisse une personne, on a l’impression d’abandonner un moribond qui va se noyer au milieu des épaves d’un naufrage.


 

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