samedi 21 novembre 2020

[Stegner, Wallace] Une journée d'automne

 



Coup de coeur 💔💔

 

Titre : Une journée d'automne
           (Remembering Laughter)

Auteur : Wallace STEGNER

Traductrice : Françoise TORCHIANA

Parution : en anglais (USA) en 1937,
                   en français en 2018

Editeur : Gallmeister

Pages : 160

 

 

 

 

 

Présentation de l'éditeur : 

Suspendue au bras de son mari Alec, Margaret guette avec impatience l’arrivée du train de sa sœur Elspeth, venue d’Écosse pour vivre avec eux dans l’Iowa. Vive et malicieuse, s’émerveillant d’un rien, Elspeth respire la joie de vivre et ne tarde pas à illuminer leur vie de riches fermiers bien installés. Mais alors que l’automne s’annonce, un triangle amoureux se forme peu à peu entre Alec et les deux sœurs. Lorsque survient l’irréparable, celui-ci ne tarde pas à se transformer en piège dramatique. Il faudra alors sauver ce qui peut l’être.

Dans ce court roman demeuré inédit en France, Wallace Stegner révèle avec la virtuosité qu’on lui connaît les drames qui se jouent derrière les apparences d’une existence paisible.

  

Le mot de l'éditeur sur l'auteur : 

Wallace Stegner est né le 18 février 1909 à Lake Mills, dans l’Iowa. Romancier, nouvelliste, historien, professeur et militant écologiste, celui qu’on appelle souvent le « doyen des écrivains de l’Ouest » (« Dean of Western Writers ») s’est imposé aussi bien à travers ses textes de fiction que ses essais.

Pendant son enfance, il vit notamment à Great Falls, dans le Montana, puis à Eastend dans le Saskatchewan (Canada). De manière générale, il déménage beaucoup à travers les États de l’Ouest américain – il dit plus tard avoir vécu « à vingt endroits, dans huit États et au Canada ». Il passe cependant la plupart de ses étés plus à l’est : à Greensboro, dans le Vermont.

Il étudie d’abord à l’université d’Utah, où il obtient un Bachelor of Arts, puis fait son master et son doctorat à l’université d’Iowa. Une fois diplômé, il enseigne dans plusieurs universités, dont l’université du Wisconsin et Harvard, avant de créer un département de creative writing à Stanford, qu’il dirige de 1945 à 1972. On compte parmi ses élèves Larry McMurtry, Edward Abbey, Raymond Carver et Thomas McGuane.

C’est en 1937 qu’il publie son premier roman, Remembering Laughter. Il est suivi par trois autres, puis, en 1943, Wallace Stegner rencontre son premier succès critique et populaire avec La Montagne en sucre (The Big Rock Candy Mountain). Parmi ses romans les plus notables, on peut notamment citer The Preacher and the Slave (1950 – plus tard rebaptisé Joe Hill : A Biographical Novel), A Shooting Star (1961), L’Envers du Temps (Recapitulation – 1961), et En lieu sûr (Crossing to Safety – 1987).

Acclamé par la critique, Wallace Stegner est couronné par le Prix Pulitzer de la fiction en 1972 pour Angle of Repose (1971) et par le National Book Award en 1977 pour The Spectator Bird (1976).

Il s’est aussi consacré à des essais, abordant des sujets très variés. On trouve notamment, parmi ses textes de non-fiction, deux histoires de l’implantation des Mormons dans l’Utah, une biographie de l’explorateur et naturaliste John Wesley Powell, ainsi qu’une histoire des débuts de l’exploitation pétrolière au Moyen-Orient. Engagé en faveur de l’environnement, il a co-fondé, en 1962, le Commitee for Green Foothills, une organisation non-gouvernementale qui agit au niveau local pour protéger les « collines, forêts, baies, marécages et zones côtières » de la péninsule de San Francisco. Le recueil Lettres pour le monde sauvage (2015) réunit douze de ses textes consacrés à des réflexions sur l’environnement et la nature.

Wallace Stegner décède le 13 avril 1993 des suites d’un accident de voiture à Santa Fe, au Nouveau-Mexique.

 

Avis :

Alec et Margaret sont à la tête d'une prospère exploitation agricole dans l'Iowa des années trente. Lorsqu'elle quitte l'Irlande pour s'installer chez eux, la jeune soeur de Margaret apporte avec elle sa fraîcheur et sa spontanéité, mais déclenche bientôt la tempête en glissant dans une relation adultère avec son beau-frère. Soucieuse de sauver avant tout et à tout prix les apparences, Margaret va enfermer le trio dans un huis-clos destructeur qui, jusqu'à la fin de leurs jours, fera de leur vie un enfer.

Wallace Stegner a laissé son imagination courir en pensant aux deux vieilles tantes lugubres de son épouse :  quel drame peuvent bien cacher deux soeurs âgées et décharnées, vivant seules avec le fils de l’une ou de l’autre - nul ne sait -, qu’elles ont élevé ensemble ? L’histoire narrée ici déroule une trame implacable et cruelle, où un instant de faute adultère fait à jamais basculer trois existences dans un cauchemar dont seule la mort aura le dernier mot. L’atmosphère passe directement de la gaieté insouciante de la jeunesse à la désolation de vies irrémédiablement ravagées. Rongés par le poison du ressentiment, de la honte et de la culpabilité, les personnages se confinent dans un non-dit sclérosant qui les lyophilise peu à peu corps et âme.

En peu de pages, l’auteur parvient à suggérer les effroyables abîmes cachés derrière des existences ordinaires, la cruauté de comportements pourtant à la base exempts de méchanceté, l’ineffable tristesse de destins résignés au malheur par pur souci des apparences. La maîtrise de la narration, le rendu psychologique des personnages, l’impact et la profondeur du récit alliés à un style épuré et sans défaut, révèlent dès ce premier roman le maître de la littérature américaine qu’allait par la suite devenir Wallace Stegner.

Une journée d’automne est un petit bijou de lecture que l’on achève impressionné par la maestria de l’écrivain, et durablement hanté par le réalisme cruel de son histoire. Coup de coeur. (5/5)


Citations :  

Son visage n'était que peau parcheminée sur les os, avec un nez saillant, un front haut, des cheveux sans vie tirés sévèrement sur le crâne, et des orbites si profondément enfoncées que, de prime abord, on les eût dites creuses comme celles d'un crâne.

L’obstination d’Alec évoquait à sa femme une paroi en caoutchouc. Celle-ci commençait par céder, mais plus on pressait fort, plus la matière se contractait.

 

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