jeudi 19 novembre 2020

[Greveillac, Paul] Art Nouveau

 


 

 

J'ai beaucoup aimé

 

Titre : Art Nouveau

Auteur : Paul GREVEILLAC

Parution : 2020 chez Gallimard

Pages : 288

 

 

 

  

 

 

 

Présentation de l'éditeur :  

1896. Lajos Ligeti, apprenti architecte, quitte Vienne pour Budapest. Porté par le rêve de bâtir, il découvre une capitale vieillotte et endormie où tout est à faire.
Pour construire la ville, il faut séduire patrons et donneurs d’ordre. Manoeuvrer contre des concurrents redoutables dont Budapest est la chasse gardée.
Inspiré par sa muse Katarzyna, épaulé par le rusé maître d’œuvre Barnabás Kocsis, Lajos Ligeti s’obstine. Parviendra-t-il à imposer son style visionnaire, à donner corps, par ses créations de béton, à un art nouveau ? Étranger, juif, verra-t-il venir les précipices ?
 
  

Un mot sur l'auteur :

Paul Greveillac a notamment déjà publié les très remarqués Les âmes rouges (2016), Maîtres et esclaves (2018).

 

 

Avis :

En 1896, le jeune Autrichien Lajos Ligeti, passionné d’architecture, quitte la majestueuse Vienne pour la bouillonnante Budapest, alors en pleine fièvre bâtisseuse. Apprenti au sein d’un grand cabinet d’architectes, il découvre les réalités du métier : la difficulté de séduire commanditaires et maîtres d’oeuvre, les rivalités et les manœuvres déloyales des concurrents, la nécessité de louvoyer et de pactiser avec les puissants … Il lui faudra des trésors de détermination pour percer et imposer son style, au cours d’une carrière qui lui fera connaître grandeur et décadence.

Classique et soigné, le récit ressuscite de façon vivante et crédible l’atmosphère optimiste et insouciante de la Belle Epoque, ces quatre décennies de paix qui ont favorisé la croissance économique et d’extraordinaires progrès techniques. Vienne, alors considérée comme l’une des plus splendides capitales d’Europe, affirme son prestige au travers d’une architecture devenue reine des arts, réinventée dans de nouveaux développements décoratifs en rupture avec l’académisme. Budapest, la seconde capitale dédaignée de l’Empire austro-hongrois, ville en profonde transformation, cherche à renforcer son identité nationale, et trouve également dans l’Art Nouveau un symbole de son affirmation et de son émancipation.

Dans cet âge d’or où se multiplient les grands chantiers publics, de nombreux architectes autrichiens et hongrois acquièrent une renommée internationale. Au milieu de ces personnages réels, l’auteur a imaginé l’apprentissage d’un jeune homme passionné et idéaliste, qui va tout sacrifier à son art. Et c’est presque dommage, tant la restitution soignée du cadre historique et le récit aux allures de biographie appelaient à la résurrection d’un de ces hommes aujourd’hui presque oubliés, plutôt qu’à l’invention romanesque d’un héros au final bien moins crédible et consistant que le riche univers pour lui si précisément recréé. Lajos Ligeti, peint dans son unique obsession professionnelle, manque globalement d’âme et d’émotions pour réellement s’incarner et convaincre.

Au bémol près de son personnage central un peu trop monolithique pour être à la hauteur du reste du roman, Art Nouveau restitue, avec force détails fascinants, un moment particulier de l’Histoire qui permit, en Europe Centrale bien plus qu’ailleurs, le bref fleurissement d’un art moderne et réformateur. (4/5)

 

 

Citations : 

Il découvrait que la prise de risque était nécessaire à la création. Que tout était question de goût. Qu’il ne préexistait, au fond, aucune règle et qu’ainsi, ainsi seulement, s’expliquait le miracle du beau.

Pourquoi, au fond, chacun voulait-il sa propre pierre tombale ? Les hommes laissaient-ils tous sur la terre une marque si indélébile, si personnelle, qu’elle dût être jetée à la face des générations futures ? Ou bien, justement, leurs sépultures étaient-elles des cache-misère ? Des cris de désespoir face à la splendide amnésie de l’Histoire ? Des poings dressés, contre le trop juste rouleau compresseur de l’oubli ?

L’accoutumance est la première des barrières dressées contre la folie. La désensibilisation est souvent la seule façon de vivre avec soi-même.

Les liens qu’on se crée sont souvent les plus forts.

Aucun art, semble-t-il, n’a tout à la fois réifié, aimé, idéalisé, sanctifié les femmes autant que l’« art nouveau ». Il s’est épanoui dans une débauche de sensualité et de vie, avant que de pourrir dans l’horreur et la mort de la guerre. Comme si la balance de l’Histoire avait, sur un coup de tête, décidé qu’il était grand temps de mettre fin aux frivolités.

2 commentaires:

  1. C'est grâce à ce roman que j'arrive sur votre blog, que je découvre... j'en garde un bon souvenir, un peu désarçonnant au début, mais si foisonnant. J'en parle sur mon blog:

    http://fattorius.blogspot.com/2022/07/art-nouveau-un-architecte-budapest.html

    Bonne fin de semaine!

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