vendredi 12 février 2021

[Vanier, Nicolas] Solitudes blanches

 


 


J'ai beaucoup aimé

 

Titre : Solitudes blanches

Auteur : Nicolas VANIER

Parution : 1994 (Actes Sud)

Pages : 246

 

  

 

 

 

 

 

Présentation de l'éditeur :  

Le roman de Nicolas Vanier (explorateur chevronné du Grand Nord) nous lance sur les traces d’un vieux trappeur devenu fou, qui s’enfonce inexorablement dans les solitudes blanches, poursuivi par Klaus, son ami, et par Ula, la belle Indienne. Une haletante histoire d’aventures, d’amour, d’amitié, de mort, dans la compagnie des chiens de traîneaux, à travers des paysages d’une effrayante beauté.

 

Un mot sur l'auteur :

Né à Dakar en 1962, Nicolas Vanier est un aventurier, écrivain et réalisateur français passionné par le Grand Nord.

 

 

Avis :

Comme tous les ans quand s’achève sa saison de chasse, le jeune trappeur Klaus rend visite à son vieil ami Prug, qui lui a tout enseigné du Grand Nord. Mais cette fois, Prug n’est pas au rendez-vous. Après la mort accidentelle de son fils, il a disparu, laissant sa bru indienne seule à la cabane. Un avion ayant repéré des traces loin au nord, Klaus et la jeune femme partent en traîneaux à chiens à la recherche du vieil homme.

Certes, l’histoire est faiblarde et répétitive, Prug déjouant sans cesse la poursuite en rabâchant à l’infini les mêmes pensées folles. Mais elle n’est ici que prétexte à un formidable récit d’aventure et de survie dans les conditions extrêmes du Grand Nord canadien, que vient sublimer l’expérience des expéditions arctiques et des courses en traîneaux de l’auteur. Dans ces paysages grandioses de neige et de glace dont la beauté n’a d’égale que leur dangerosité, blizzards et white-outs s’acharnent à gommer toute possibilité de vie. Par moins 40°C, les doigts gèlent en quelques instants et rendent impuissants à assurer les gestes essentiels. Quand survivre peut dépendre d’allumer un feu, d’abattre du gibier, de préserver ses chiens ou d’éloigner les loups, la moindre erreur et la plus petite inattention s’avèrent fatales à tous les coups, la situation pouvant basculer en une poignée de secondes.

Autant glacé qu’ébloui par l’âpre et périlleuse splendeur de ces solitudes blanches et de leur faune évanescente, le lecteur se retrouve transporté dans un voyage de l’extrême, empli de sensations fortes et habité par la passion de l’auteur. Hymne à la nature, hommage aux peuples indiens et inuits dont on apprendra d’ailleurs qu’ils ne s’entendent guère, ce livre est l’occasion de partager l’ivresse de la course et l’extraordinaire relation du musher avec ses chiens, dans une aventure de tous les dangers, réservée aux seuls plus aguerris et expérimentés. (4/5)

 

Citations :

Ils s’arrêtèrent. Les chiens se couchèrent dans la neige fraîche soufflée par le vent. Une compagnie de perdrix blanches blotties derrière quelques épinettes à l’abri du col s’envola vers le nord. Le soleil n’était pas encore monté au-dessus des montagnes. Il rampait sur la taïga fumante comme un grand linge humide que l’on eût mis à sécher. La cime des montagnes, seule, sortait de l’ombre, rose et rouge, embrasée comme si la neige eût pris feu.

Il connaissait l’aversion que nourrissent les Indiens à l’encontre des Esquimaux et de leur territoire. D’ailleurs, les Esquimaux étaient devenus les habitants des terres sans arbres contraints et forcés, repoussés par les Indiens qui considéraient la tree’s line comme la frontière nord d’un pays leur appartenant tout entier. Alors, les Inuits avaient gagné l’Arctique, las des guerres, pour y vivre en paix, dans la plus totale et la plus extraordinaire des simplicités. Ils se logeaient dans des maisons de neige, se chauffaient et s’habillaient avec les produits de leur chasse, vivaient dans la nuit arctique six mois sur douze et mouraient plus souvent de famine ou d’accidents de chasse que de vieillesse. Les Indiens, qui les appelaient péjorativement mangeurs de viande crue, « Esquimau », crachaient au sol quand on leur parlait d’eux (…).

La harde manœuvra comme un seul animal pivotant sur place pour partir en sens inverse. Le balayage de leur longue jupe de poils ressemblait à une vague. La teinte ombrée de leur pelage scintilla dans la lumière pâle. Épaule contre épaule, flanc contre flanc, ils prirent la fuite au galop, soulevant des nuages de neige se mêlant à ceux que le vent soulevait du sol.

Tout ce qui arrive à la terre arrive aux fils de la terre. Ce n’est pas l’homme qui a tissé la trame de la vie : il en est seulement un fil. Tout ce qu’il fait à la trame, il le fait à lui-même.


 

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