J'ai beaucoup aimé
Titre : Les petits farceurs
Auteur : Louis-Henri de LA ROCHEFOUCAULT
Parution : 2023 (Robert Laffont)
Pages : 256
Présentation de l'éditeur :
Lorsque Paul le provincial rencontre Henri le
Parisien, c'est l'amitié immédiate. Ils sont étudiants et s'imaginent
des destins flamboyants. Devenu un journaliste dilettante, Henri
découvre les arrière-cuisines de la presse et de l’édition. Paul publie
un premier roman ambitieux – que personne ne lit. Malgré cet échec, un
éditeur rompu à tous les coups lui propose d'écrire dans l'ombre les
best-sellers des autres. Mais peut-on prêter sa plume sans vendre son âme
?
Dans un Paris dont la cruauté pousse à la mélancolie ou au détachement, même l'amitié est mise à l'épreuve ; tout autant que l'amour, dernier carrefour des illusions. Paul et Henri s'étaient rêvés grands écrivains, ils ne seront jamais que de petits farceurs...
Dans un Paris dont la cruauté pousse à la mélancolie ou au détachement, même l'amitié est mise à l'épreuve ; tout autant que l'amour, dernier carrefour des illusions. Paul et Henri s'étaient rêvés grands écrivains, ils ne seront jamais que de petits farceurs...
Le mot de l'éditeur sur l'auteur :
Louis-Henri de La Rochefoucauld est journaliste et écrivain. Il a publié Mémoires d'un avare, La Prophétie de John Lennon, Le Club des vieux Garçons, La Révolution française et Châteaux de sable.
Avis :
Les temps changent mais la comédie humaine demeure. Déclinaison contemporaine des Illusions perdues de Balzac, cette comédie enjouée et désenchantée dresse une satire féroce du monde de l’édition et de la presse.A la mort de son ami Paul Beuvron, Henri d’Estissac, journaliste d’un magazine branché, se retrouve le légataire de ses documents personnels. Ramené à ses souvenirs de leur rencontre en classe préparatoire littéraire, alors qu’ils débordaient encore d’ambitions quand à leur avenir, il se met à retracer leurs parcours respectifs, lui d’abord pigiste puis précaire plumitif pour une revue culturelle provocatrice et décalée – le double aisément reconnaissable de Technikart où collabore l’auteur –, Paul, écrivain génial d’un roman monumental resté confidentiel, bientôt réduit à produire à la chaîne les best-sellers signés par d’autres et à servir de prête-plume à un ministre dépravé.
N’en déplaise à leurs nobles idéaux littéraires, Paul et Henri se heurtent bien vite à une réalité : « Le monde des lettres ne jure plus que par les chiffres. » Industrie soumise comme une autre aux diktats de la rentabilité commerciale, l’univers feutré de l’édition gère la littérature en marchandise et les auteurs comme des marques. Tant pis pour le génie littéraire trop souvent invendable, ce qu’il faut, ce sont des « moyens de palper », de « l’artillerie lourde », « des blockbusters littéraires » capables de « bombarder les librairies » en fin d’année et de « bousiller la concurrence en mode bulldozer ». Pour ces grandes manœuvres, bien des coups sont permis et, avec le piquant sans méchanceté d’une lucidité pleine d’humour, la satire s’en donne à coeur joie, décrivant savoureusement cuisines et arrière-cuisines, de l’édition mais aussi de la presse, des prix et de la critique littéraires.
En familier de ces milieux, l’auteur ne se dépare jamais du plus parfait réalisme et, captivé autant qu’amusé par le sens de la formule qui égaye chaque page de la succulence et de la justesse de ses trouvailles, l’on se régale de ce roman drôle et cruel qui pousse la facétie jusqu’à paraître en pleine rentrée littéraire. Entamé sur cet exergue emprunté à Balzac : « tu pourras être un grand écrivain, mais tu ne seras jamais qu’un petit farceur », cette tragi-comédie est aussi un requiem pour les illusions perdues d’un écrivain maudit. « Les maudits ne mènent pas la grande vie. On ne peut pas avoir le spleen et l'argent du spleen. » (4/5)
Citations :
Nous nous étions rencontrés en 2003 en classe préparatoire, où notre entente avait été immédiate. À certains égards, je le voyais comme un frère, voire un double – à ce détail près qu’il était moins désinvolte et plus désenchanté que moi, et surtout infiniment plus doué. Mais la vraie différence entre nous, la voici : en provincial motivé, Paul tenait à tout prix à réussir alors que, en Parisien blasé, il ne me déplaisait pas d’échouer pourvu qu’il y ait eu du bon temps. L’expérience intérieure et l’émotion vécue m’importaient plus que le résultat des courses. Nous voulions découvrir un jour ce qu’il y a derrière le rideau de la vie courante, aller de l’autre côté – mais où, ça, nous ne le savions pas. Nous n’étions pas des mystiques, aussi la foi ne nous a-t-elle pas permis de passer du monde visible au monde invisible. Jeune homme, Paul parlait de montagnes poétiques, d’un Everest accessible par la face nord de la littérature. Je ne comprenais pas tout à son charabia. À l’arrivée, il n’a pas atteint les paradis perdus aux neiges éternelles : il s’est faufilé par l’entrée des artistes et n’a exploré que les coulisses de l’industrie culturelle, puis celles du pouvoir. Il a beaucoup travaillé, en a été déçu.
« J’ai un article qui saute dans notre numéro à paraître fin août. Ça libère une page. Ton ami, là, Beuvron, tu ne veux pas l’écarteler ?
— Ce ne serait pas très sympa…
— C’est vieillot, son truc, un exercice de style prétentieux, on dirait le livre d’un centenaire. Tu ne trouves pas ?
— Ne fais pas de jeunisme : ils ont leurs qualités, les livres de centenaire.
— Avant-garde ne peut pas défendre ça. Pense un peu à toi : l’éreintement est une gymnastique de l’esprit. Si tu veux progresser, tu dois en commettre de temps en temps. Et puis tu lis Le Figaro, je crois ?
— Quel est le rapport ?
— Je ne t’apprendrai pas la phrase de Beaumarchais qui sert de devise au journal : “Sans la liberté de blâmer, il n’est point d’éloge flatteur.” Si tu ne t’octroies pas toi-même régulièrement le droit de flinguer, tes compliments ne vaudront plus un clou. On ne te prendra pas au sérieux. On dira de toi que tu n’es qu’un robinet d’eau tiède. C’est ça que tu veux être dans la vie ? Tu veux qu’on écrive ça sur ta pierre tombale : “Henri d’Estissac, 1985-…, profession robinet d’eau tiède” ?
— Mon ami Beuvron ne va pas comprendre, il trouvera ça dégueulasse…
— Oh, c’est mon quotidien… Me faire enguirlander par les éditeurs et les labels… Rien de grave en vérité : tant qu’ils ont besoin de nous, ils finissent toujours par revenir. C’est du catch, la critique : tout est faux. Quant à ton Paul, tu lui expliqueras que c’est pour son bien, qui aime bien châtie bien, etc. Et surtout tu lui préciseras que c’est excellent pour sa promo.
— Comment ça ?
— Regarde toutes ces piles sous lesquelles on croule… Comment tirer son épingle du jeu ? Comment survivre ? Comment exister ne serait-ce qu’une seconde ? Si tu assassines proprement ce Beuvron, ça fera parler. Par esprit de contradiction, d’autres voudront le soutenir. Nos ennemis seront ses amis.
En plus d’être d’une susceptibilité et d’une fierté de coqs, les écrivains sont d’une confondante naïveté. Si ces dindons connaissaient l’envers du décor, les éditeurs qui jouent avec eux comme avec des pions jetables, les critiques qui ne liront jamais leurs livres et se moquent d’eux dans leur dos, leurs amis proches qui déblatèrent au cours de dîners auxquels eux ne sont plus conviés… Il me semble que ça leur ferait du bien d’ouvrir les yeux – mais peut-être que ça les anéantirait.
« J’aime beaucoup ce que vous faites, cette littérature expérimentale incompréhensible pour les non-initiés, mais vous devez comprendre que ça ne nous nourrit pas. Dans l’édition, on ne vit pas d’amour et d’eau fraîche. Il faut inventer des moyens de palper.
— Et ?
— Et avec vous, par exemple, je ne palpe pas du tout.
— Avec qui palpez-vous ?
— C’est tout le problème, justement… Des auteurs avec lesquels on perd un tas d’oseille, on en trouve partout, ce n’est pas ça qui manque ; mais des auteurs avec lesquels on palpe, ça on en cherche désespérément. Et là, j’en ai signé un.
— C’est secret ?
— Plus ou moins… Je vais vous le confier car je veux vous mettre dans la boucle : il s’agit de Patrick Rossi.
— Vous rigolez ? Rossi chez Marcillac ?
— Ça vient du groupe… Ils m’ont aidé à avoir le Goncourt ; en échange, je dois m’occuper du dossier Rossi. Rossi a des tirages mirifiques mais souffre d’un vrai déficit d’image – tout le monde le prend pour un péquenaud, pour dire les choses franchement. Il est en quête de crédibilité littéraire, onction divine que nous pouvons lui apporter.
— Ne risquez-vous pas de vous décrédibiliser par la même occasion ?
— Oh, Marcillac est une maison bien assez ancienne pour encaisser le choc… »
Le pacha pachyderme a tiré sur son cigare avec la sérénité de celui qui en a vu d’autres. La décoration de son bureau n’était pas constituée de bibelots achetés la veille dans une boutique à la mode. Il avait sur sa table d’épais livres de comptes des années 1850. Et derrière lui, sur une étagère, on voyait quatre bustes en bronze : ceux de Liancourt, Guyon, Combreux et Blanzac – le mont Rushmore des éditions Marcillac, à défaut d’être celui de la littérature française du xixe siècle.
« Vous, à titre personnel, vous aimez les livres de Rossi ?
— Si je devais ne serait-ce qu’apprécier ce que je publie, cela ferait longtemps que j’aurais fait faillite… Tout éditeur qui se respecte juge épouvantable la majorité de sa production ! Rossi, c’est du petit polar sentimental à la mords-moi-le-nœud – aucun intérêt, mais ça marche.
— Et en quoi puis-je vous aider ?
— Vous ne devez pas vous en souvenir, mais l’an dernier il y a eu un canular autour d’une vraie-fausse candidature de Rossi à l’Académie française.
— J’avais suivi ça, en effet.
— Rossi, qui est un peu parano, a cru que ça venait de chez son éditeur, que quelqu’un s’y foutait de lui. Il a demandé la tête de plusieurs personnes, ça s’est envenimé, la situation n’était plus tenable. Le problème, c’est qu’il s’est brouillé à mort avec son éditeur, qui était, comment dire, très… interventionniste.
— Vous insinuez que Rossi n’écrit pas ses livres ?
— Moins fort ! Pourquoi tout le monde parle si fort dans cette maison ? Et ne commencez pas à casser du sucre sur le dos de notre prochaine poule aux œufs d’or. Les bonnes idées sont de Patrick, bien sûr, les meilleures phrases aussi. Et ses scènes, toutes ses si belles scènes… Patrick a une façon inégalable de camper ses personnages, de créer des ambiances. Il a par ailleurs un grand art de la construction et des dialogues qui font mouche. Cependant, oui, il a besoin d’un partenaire de jeu…
— Dois-je comprendre que vous me demandez d’être son nègre ?
— Son partenaire de jeu, je vous dis. Patrick a perdu toute confiance en lui, il faut l’épauler et le motiver. Qui peut le plus peut le moins : vous avez su pasticher Chateaubriand, vous saurez pasticher Rossi. Attention, toutefois : il faudra singer Rossi, mais en le tirant vers le haut.
— Et ?
— Et avec vous, par exemple, je ne palpe pas du tout.
— Avec qui palpez-vous ?
— C’est tout le problème, justement… Des auteurs avec lesquels on perd un tas d’oseille, on en trouve partout, ce n’est pas ça qui manque ; mais des auteurs avec lesquels on palpe, ça on en cherche désespérément. Et là, j’en ai signé un.
— C’est secret ?
— Plus ou moins… Je vais vous le confier car je veux vous mettre dans la boucle : il s’agit de Patrick Rossi.
— Vous rigolez ? Rossi chez Marcillac ?
— Ça vient du groupe… Ils m’ont aidé à avoir le Goncourt ; en échange, je dois m’occuper du dossier Rossi. Rossi a des tirages mirifiques mais souffre d’un vrai déficit d’image – tout le monde le prend pour un péquenaud, pour dire les choses franchement. Il est en quête de crédibilité littéraire, onction divine que nous pouvons lui apporter.
— Ne risquez-vous pas de vous décrédibiliser par la même occasion ?
— Oh, Marcillac est une maison bien assez ancienne pour encaisser le choc… »
Le pacha pachyderme a tiré sur son cigare avec la sérénité de celui qui en a vu d’autres. La décoration de son bureau n’était pas constituée de bibelots achetés la veille dans une boutique à la mode. Il avait sur sa table d’épais livres de comptes des années 1850. Et derrière lui, sur une étagère, on voyait quatre bustes en bronze : ceux de Liancourt, Guyon, Combreux et Blanzac – le mont Rushmore des éditions Marcillac, à défaut d’être celui de la littérature française du xixe siècle.
« Vous, à titre personnel, vous aimez les livres de Rossi ?
— Si je devais ne serait-ce qu’apprécier ce que je publie, cela ferait longtemps que j’aurais fait faillite… Tout éditeur qui se respecte juge épouvantable la majorité de sa production ! Rossi, c’est du petit polar sentimental à la mords-moi-le-nœud – aucun intérêt, mais ça marche.
— Et en quoi puis-je vous aider ?
— Vous ne devez pas vous en souvenir, mais l’an dernier il y a eu un canular autour d’une vraie-fausse candidature de Rossi à l’Académie française.
— J’avais suivi ça, en effet.
— Rossi, qui est un peu parano, a cru que ça venait de chez son éditeur, que quelqu’un s’y foutait de lui. Il a demandé la tête de plusieurs personnes, ça s’est envenimé, la situation n’était plus tenable. Le problème, c’est qu’il s’est brouillé à mort avec son éditeur, qui était, comment dire, très… interventionniste.
— Vous insinuez que Rossi n’écrit pas ses livres ?
— Moins fort ! Pourquoi tout le monde parle si fort dans cette maison ? Et ne commencez pas à casser du sucre sur le dos de notre prochaine poule aux œufs d’or. Les bonnes idées sont de Patrick, bien sûr, les meilleures phrases aussi. Et ses scènes, toutes ses si belles scènes… Patrick a une façon inégalable de camper ses personnages, de créer des ambiances. Il a par ailleurs un grand art de la construction et des dialogues qui font mouche. Cependant, oui, il a besoin d’un partenaire de jeu…
— Dois-je comprendre que vous me demandez d’être son nègre ?
— Son partenaire de jeu, je vous dis. Patrick a perdu toute confiance en lui, il faut l’épauler et le motiver. Qui peut le plus peut le moins : vous avez su pasticher Chateaubriand, vous saurez pasticher Rossi. Attention, toutefois : il faudra singer Rossi, mais en le tirant vers le haut.
On était au printemps et Emma Roche n’avait aucune cartouche pour la fin de l’année, pas le moindre best-seller potentiel, or on sait que le dernier trimestre est porteur pour les éditeurs, avec Noël en ligne de mire. Il fallait qu’elle trouve d’urgence deux ou trois « blockbusters littéraires », de l’artillerie lourde pour « bombarder les librairies d’ici décembre » et « bousiller la concurrence en mode bulldozer ». Mais c’était devenu si difficile, selon elle, les livres ayant de moins en moins le temps de s’installer…
Pompette, Paul lui a rétorqué que c’était une idée reçue. Dans la préface de la deuxième partie des Illusions perdues, Balzac écrivait que « par le temps actuel, un livre n’a pas six semaines à vivre » – des propos qui dataient de 1839 !
« Balzac ou pas, il n’empêche que les gens ont de moins en moins le temps de lire.
— Vraiment ?
— Les écrans ont remplacé l’écrit. »
Un autre lieu commun… En khâgne à Daniélou, nous avions été fascinés, Paul et moi, par une phrase de Diderot dans son Éloge de Richardson, ce texte sur le romancier anglais qu’il vénérait : « Chez un peuple entraîné par mille distractions, où le jour n’a pas assez de ses vingt-quatre heures pour les amusements dont il s’est accoutumé de les remplir, les livres de Richardson doivent paraître longs. » On était en 1761 ! « Il n’y avait pas alors autant de divertissements…
— Je suis sûr que, dès les années 1450, Gutenberg jugeait qu’on imprimait trop de livres.
— Le marché se rétracte et les leviers de croissance ne sont pas infinis… Avec en plus l’éclatement de la prescription, les libraires qui rament et la presse qui n’existe plus que pour trois ou quatre grand-mères… À l’heure actuelle, nous devons produire moins mais produire mieux. En étant omniprésents sur les derniers secteurs qui fonctionnent. Et en dénichant les nouveaux talents qu’on pourra pousser au firmament des ventes.
— Oh, ce n’est pas nouveau, Martin Marcillac voulait déjà faire du commerce en 1835, les éditeurs n’ont jamais été des enfants de chœur… »
Pompette, Paul lui a rétorqué que c’était une idée reçue. Dans la préface de la deuxième partie des Illusions perdues, Balzac écrivait que « par le temps actuel, un livre n’a pas six semaines à vivre » – des propos qui dataient de 1839 !
« Balzac ou pas, il n’empêche que les gens ont de moins en moins le temps de lire.
— Vraiment ?
— Les écrans ont remplacé l’écrit. »
Un autre lieu commun… En khâgne à Daniélou, nous avions été fascinés, Paul et moi, par une phrase de Diderot dans son Éloge de Richardson, ce texte sur le romancier anglais qu’il vénérait : « Chez un peuple entraîné par mille distractions, où le jour n’a pas assez de ses vingt-quatre heures pour les amusements dont il s’est accoutumé de les remplir, les livres de Richardson doivent paraître longs. » On était en 1761 ! « Il n’y avait pas alors autant de divertissements…
— Je suis sûr que, dès les années 1450, Gutenberg jugeait qu’on imprimait trop de livres.
— Le marché se rétracte et les leviers de croissance ne sont pas infinis… Avec en plus l’éclatement de la prescription, les libraires qui rament et la presse qui n’existe plus que pour trois ou quatre grand-mères… À l’heure actuelle, nous devons produire moins mais produire mieux. En étant omniprésents sur les derniers secteurs qui fonctionnent. Et en dénichant les nouveaux talents qu’on pourra pousser au firmament des ventes.
— Oh, ce n’est pas nouveau, Martin Marcillac voulait déjà faire du commerce en 1835, les éditeurs n’ont jamais été des enfants de chœur… »
« Le gang des pastiches » : l’expression était d’Emma Roche, ravie d’avoir trouvé en Paul l’alter ego parfait pour exécuter ses vils coups marketing. Malgré sa jambe raide, il faisait preuve d’une assurance surprenante. Dans son bel appartement de la cité de Varenne, une bibliothèque à échelle ornait le salon. Paul y avait aligné une intégrale reliée de La Comédie humaine, les numéros du magazine Punch contenant La Foire aux vanités de Thackeray, la première édition des Caractères de La Bruyère et d’autres livres de collection. Une étagère entière était réservée à ses productions pour les autres. En démiurge au petit pied, il lui semblait fascinant de voir que tous les best-sellers de notre époque étaient signés par un seul homme : lui !
En vérité, qu’était-il ? Un ventriloque ? Un illusionniste ? Dans ce western que devenait l’édition, Paul se définissait en riant comme « un chasseur de primes », « un desperado littéraire », « un pistolero du traitement de texte ». Personne n’aurait osé le provoquer en duel dans quelque saloon. Qu’attendait le shérif ? Quand sortirait-on le goudron et les plumes pour cette fine gâchette qui tirait plus vite que son ombre, mais finirait par retourner son arme contre lui à force d’accepter tout et n’importe quoi ? Je n’osais lui dire ce que je pensais de lui : qu’il n’était qu’un larbin assurant des ménages.
En vérité, qu’était-il ? Un ventriloque ? Un illusionniste ? Dans ce western que devenait l’édition, Paul se définissait en riant comme « un chasseur de primes », « un desperado littéraire », « un pistolero du traitement de texte ». Personne n’aurait osé le provoquer en duel dans quelque saloon. Qu’attendait le shérif ? Quand sortirait-on le goudron et les plumes pour cette fine gâchette qui tirait plus vite que son ombre, mais finirait par retourner son arme contre lui à force d’accepter tout et n’importe quoi ? Je n’osais lui dire ce que je pensais de lui : qu’il n’était qu’un larbin assurant des ménages.
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