samedi 4 juillet 2020

[Sainz Borgo, Karina] La fille de l'Espagnole





J'ai aimé

 

Titre : La fille de l'Espagnole
          (La Hija de la Española)

Auteur : Karina SAINZ BORGO

Traductrice : Stéphanie DECANTE

Parution : en espagnol (Venezuela) en 2019,
                en français en 2020 (Gallimard)

Pages : 240

 

 

 

 

 

 

Présentation de l'éditeur :   

Adelaida Falcón vient d’enterrer sa mère lorsque de violentes manifestations éclatent à Caracas. L’immeuble où elle habite se retrouve au cœur des combats entre jeunes opposants et forces du gouvernement. Expulsée de son logement puis dépouillée de ses affaires au nom de la Révolution, Adelaida parvient à se réfugier chez une voisine, une jeune femme de son âge surnommée «la fille de l’Espagnole». Depuis cette cachette, elle va devoir apprendre à devenir (une) autre et à se battre, pour survivre dans une ville en ruine qui sombre dans la guerre civile.
Roman palpitant et d’une beauté féroce, le récit de cette femme seule sonne juste, comme une vérité, mais également comme un avertissement. Il nous parle depuis l’avenir, à la manière d’une dystopie, nous rappelant que notre monde peut s’effondrer à tout moment, qu’il est aussi fragile que nos souvenirs et nos espoirs.

 

 

Un mot sur l'auteur :

Née au Venezuela en 1982, Karina Sainz Borgo est journaliste et vit à Madrid. La fille de l'Espagnole est son premier roman. Les éditeurs d'une vingtaine de pays en ont acquis les droits.

 

 

Avis :

Encore désemparée par le récent décès de sa mère, Adelaida Falcón doit faire face, seule, aux terribles événements qui secouent Caracas : de violents affrontements entre opposants et forces armées gouvernementales mettent la ville à feu et à sang. Chassée de chez elle, elle parvient à se cacher dans l’appartement déserté de sa voisine, dite la Fille de l’Espagnole. Spoliée de jusqu’à son identité, elle va devoir tenter de sauver sa vie et réussir à prendre la fuite.

Elle-même née à Caracas et installée en Espagne depuis 2006, l’auteur nous plonge dans la vertigineuse déliquescence dans laquelle le Venezuela est tombé, évoquant, en une vision cauchemardesque et apocalyptique qui semble à peine dystopique, un climat de guerre civile où règnent le chaos, la peur, la faim et le manque de tout, où chacun est quotidiennement amené aux pires compromissions pour échapper aux arrestations, à la torture et à la mort, et même pour simplement se nourrir : ainsi contraints de participer malgré eux au processus de pourrissement général, c’est jusqu’à leur âme que les habitants ont l’impression de livrer à la gangrène.

L’horreur imprègne chaque page, que ce soit au fil d’exactions toutes plus insoutenables les unes que les autres, qu’au travers des souffrances psychologiques dans lesquelles se débat Adelaida. Au-delà du saisissement, c’est rapidement un terne abattement qui s’empare du lecteur, asphyxié par un texte uniformément noir et monotone qui, tout entier préoccupé de témoignage et de dénonciation politique, en perd son souffle romanesque.

C’est avec soulagement que je suis parvenue au bout de cette lecture utile mais éprouvante, qui fait entrevoir une réalité venezuelienne pire que la plus désespérée des fictions. (3/5)

 

 

Citations :

Une série de coïncidences a fini par nous unir : les horaires de l’université, les matières dans lesquelles nous nous inscrivions… Mais si on me demandait pourquoi nous sommes restées amies toutes ces années, je ne pourrais pas bien en expliquer la raison. C’était comme ce qui transforme les amours en mariages. Souvent, on n’a pas trop le choix et si la compagnie de l’autre n’est pas désagréable, on laisse le temps faire son œuvre.

Si, petite, c’était une enfant effacée, en grandissant elle n’avait pas non plus réussi à réunir les qualités nécessaires pour s’imposer. Elle donnait l’impression d’habiter une frontière perpétuelle : ni vénézuélienne ni espagnole, ni jolie ni laide, ni jeune ni vieille. Destinée aux limbes où finissent ceux qui n’appartiennent à nulle part. Aurora Peralta souffrait de la malédiction de ceux qui naissent trop tôt dans un pays et arrivent trop tard dans l’autre.

Vivre, un miracle que je ne parviens pas encore à comprendre et qui nous mord avidement avec les crocs de la culpabilité. Survivre fait partie de l’horreur qui voyage avec celui qui fuit. Une bête perfide qui cherche à nous mettre à terre quand elle nous trouve sains et saufs, pour nous faire savoir que quelqu’un méritait plus que nous de continuer à vivre.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire