lundi 13 avril 2020

[Dusapin, Elisa Shua] Les billes du Pachinko






 

Coup de coeur 💓

 

Titre : Les billes du Pachinko

Auteur : Elisa Shua DUSAPIN

Editeur : ZOE

Année de parution : 2018

Pages : 144

 

 

 

 

 

 

Présentation de l'éditeur :   

Claire va avoir trente ans et passe l’été chez ses grands-parents à Tokyo. Elle veut convaincre son grand-père de quitter le Pachinko qu’il gère pour l’emmener avec sa grand-mère revoir leur Corée natale, où ils ne sont pas retournés depuis la guerre. Le temps de les décider à faire ce voyage, Claire s’occupe de Mieko, une petite Japonaise à qui elle apprend le français. Elisa Shua Dusapin propose un roman de filiation, dans lequel elle excelle à décrire l’ambivalence propre aux relations familiales. Elle dépeint l’intériorité de ses personnages grâce une écriture dépouillée et plonge le lecteur dans une atmosphère empreinte d’une violence feutrée où l’Extrême-Orient joue son rôle.

 

 

Le mot de l'éditeur sur l'auteur :

Née en 1992 d’un père français et d’une mère sud-coréenne, Elisa Shua Dusapin grandit entre Paris, Séoul et Porrentruy. Diplômée en 2014 de l’Institut littéraire suisse de Bienne (Haute Ecole des Arts de Berne), elle se consacre à l’écriture et aux arts de la scène, entre deux voyages en Asie de l’Est.

 

Avis :

Claire, la narratrice, vit en Suisse. Elle profite des vacances d’été pour se rendre chez ses grands-parents, installés à Tokyo depuis leur fuite de la Corée en guerre il y a cinquante ans. La jeune femme s’est mise en tête de ramener le vieux couple quelques jours dans sa patrie d’origine. En attendant de le convaincre, elle donne des cours de français à une petite écolière japonaise, avec laquelle elle entretient bientôt une relation d’affection partagée.

Elle-même franco-coréenne établie en Suisse, l’auteur nous fait découvrir les Zainichi, ces descendants des Coréens venus s’installer au pays du Soleil-Levant pendant l’occupation japonaise de leur pays, notamment au cours de la seconde guerre mondiale. Déportés en masse au Japon pour compenser la pénurie de main d’oeuvre d’alors, travaillant souvent dans des conditions misérables, ils y ont toujours été l’objet de discriminations racistes héritées du colonialisme japonais.

De nombreux détails rendent fascinante cette plongée dépaysante au sein de la plus importante communauté d'origine étrangère au Japon, à commencer par la tradition du Pachinko, hybride du flipper et de la machine à sous, à l’origine d’une véritable industrie aux mains des Zainichi. Leurs salles de jeux font fureur au Japon, où les casinos sont interdits. Les billes recrachées par les machines sont convertibles en lots de faible valeur, ensuite monnayables dans des bureaux d’échanges à proximité des salles de Pachinko : un vrai phénomène de société au Japon.

Avec des chapitres courts et une grande sobriété d’écriture, l’auteur nous entraîne dans un récit rythmé, sous-tendu par le malaise de Claire, écartelée entre Europe, Japon et Corée. Malgré tous ses efforts et ses bonnes intentions, rien ne se passe comme l’imaginait la jeune femme, la barrière des langues, des cultures et des générations, tout comme le poids de l’Histoire, ne cessant de générer malentendus et incompréhensions, interdisant toute vraie communication entre les personnages. Finalement, ligotée dans les non-dits et impuissante face aux souffrances de ses proches, c’est à la recherche de sa propre identité que va se retrouver confrontée Claire.

La complexité des personnages et de leurs relations fait toute la richesse de cette histoire courte et faussement simple, où chaque détail s’avère hautement signifiant : un peu comme si chaque kokeshi en cachait une autre, à la manière des poupées russes… Coup de coeur. (5/5)

 

 

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2 commentaires:

  1. C'est le deuxième roman de cet auteur que je lis.
    J'ai encore trouvé beaucoup de bonheur à le lire.
    Le texte est toujours sobre. J'allais dire que c'est une épure.
    Cela donne une très grande force poétique au texte. J'y ressens du calme, de la paix, de la sérénté.

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    1. Très juste le mot épure : tant de choses signifiées avec si peu de pages...

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