vendredi 31 mai 2024

[O'Connor, Joseph] Dans la maison de mon père

 



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Titre : Dans la maison de mon père
            (In my Father's House)

Auteur : Joseph O'CONNOR

Traduction : Carine CHICHEREAU

Parution :  en anglais (Irlande) en 2021,
                   en français en
2024 (Rivages)

Pages : 392

 

 

 

 

 

 

Présentation de l'éditeur :

Inspiré de l’histoire vraie de Hugh O’Flaherty, le prêtre irlandais rattaché au Vatican qui a défié les nazis et sauvé plus de 6000 juifs et soldats alliés de l’enfer de Rome en 1943, Dans la maison de Mon Père est un thriller littéraire de premier ordre. A la manière d’Hilary Mantel, Joseph O’Connor mêle histoire et fiction dans un véritable tour de force narratif, un récit haletant à l'intrigue parfaitement ficelée. A travers le destin et les choix courageux de personnages aussi attachants qu'inspirants, il rend un superbe hommage à ceux qui ont su suivre leurs convictions dans les temps les plus troubles.

 

 

Le mot de l'éditeur sur l'auteur : 

Né à Dublin en 1963, Joseph O’Connor tombe dans la littérature à 17 ans en lisant L’Attrape-cœur de Salinger. D’abord journaliste (Esquire, The Irish Tribune, Sunday Tribune) et homme de radio, il écrit aussi pour la scène et pour des productions musicales. Il s’impose avec son premier livre, un recueil de nouvelles publié en France sous le titre Les Bons Chrétiens (Libretto, 2010, traduction Pierrick Masquart et Gérard Meudal). Il est l’auteur de neuf romans parmi lesquels Redemption Falls (2007), Muse (2011), Maintenant ou jamais (2016) et Le Bal des ombres (2020). Avec Roddy Doyle ou Colm Tóibín, il est considéré comme l’un des écrivains irlandais les plus importants de sa génération. Traduite dans le monde entier, son œuvre lui a valu de nombreux prix dont le Irish PEN Award en2012. Inspiré de l’histoire vraie de Hugh O’Flaherty, prêtre irlandais qui a défié les nazis et sauvé plus de 5 000 juifs et soldats alliés pendant la Seconde Guerre mondiale, Dans la maison de mon Père se tient en parfait équilibre entre l’improbabilité des faits réels et la vérité romanesque.

 

 

Avis :

Surnommé le « Mouron rouge du Vatican » pour son habileté à jouer au chat et à la souris avec la Gestapo, le prêtre irlandais Hugh O’Flaherty a sauvé des milliers de Juifs et de soldats alliés alors qu’il était attaché au Saint-Siège lors de la Seconde guerre mondiale. Il a inspiré à son compatriote, l’auteur Joseph O’Connor, un thriller historique qui, en lui rendant hommage, n’est pas sans questionner la neutralité du Vatican.

« La neutralité est le pire des extrémismes ; sans elle, nulle tyrannie ne peut s’épanouir. »
C’est en lui prêtant ces mots, complétés dans le titre par la référence au verset de la Bible – « Dans la maison de mon père, il y a plusieurs demeures » –, que l’auteur introduit sa « mise en roman » de l’héroïque insubordination de celui qui, fin lettré amateur de golf et champion de boxe, élevé au titre honorifique de Monseigneur après ses fonctions d’ambassadeur du Vatican dans divers pays, profita de son rattachement au Saint-Siège durant l’occupation de Rome lors de la seconde guerre mondiale pour, sans la permission de sa hiérarchie et du pape Pie XII, organiser un réseau d’évasion de Juifs persécutés et de prisonniers alliés.

Lorsque l’Italie change de camp en 1943, Rome est occupée par l’Allemagne, mais le Vatican resté neutre demeure un îlot intouché, même si la pire incertitude règne quant à l’imminence d’une invasion. En ces lieux où l’espionnage fait rage, les forces nazies menées par l’Hauptsturmführer Herbert Kappler – si tristement célèbre pour ses terribles méfaits que l’auteur a préféré le fictionnaliser et changer son nom dans son roman plutôt que de perpétrer sa sinistre mémoire – ont vite fait d’identifier O’Flaherty comme leur ennemi numéro un. Mais l’homme, averti qu’ils n’en feraient qu’une bouchée s’ils le surprenaient ne serait-ce qu’un orteil en dehors du Vatican, les nargue depuis les marches de la basilique Saint-Pierre, poursuivant, avec son réseau de sympathisants, des sauvetages à leur nez et à leur barbe.

En cohérence avec l’image de ce prêtre pas comme les autres glissant les codes de ses opérations dans les partitions de sa chorale, Joseph O’Connor a organisé son roman en un choeur de voix, témoignages écrits ou enregistrements fictivement recueillis une vingtaine d’années après les faits, venant s’intercaler au compte à rebours d’un « Rendimento », une action d’importance visant au transfert des fonds nécessaires à la protection des personnes cachées un peu partout dans Rome et ses alentours. Dans son style, très (trop ?) appuyé ici, aimant les rafales de phrases sans verbe, le récit s’inspire de la trame historique pour développer librement une intrigue haletante, peut-être pas toujours parfaitement crédible dans ses détails les plus spectaculaires, mais qui nous plonge efficacement au coeur des risques absolus pris par O’Flaherty et les membres de son réseau, certains éminents comme l’ambassadeur britannique au Vatican sir d’Arcy Osborne, le major Sam Derry ou la chanteuse irlandaise Delia Kiernan, la plupart anonymes et oubliés de l’Histoire. Surtout, elle donne un aperçu nuancé de ce qu’a bien pu être la personnalité hors norme de cet homme d’Eglise courageusement rebelle qui, après guerre, refusa toute pension en accompagnement de ses multiples distinctions et rendit régulièrement visite à Herbert Kappler dans sa prison à vie.

Malgré ce que l’on pourra lui trouver d’excessive générosité en sauce romanesque, c’est avec fièvre que l’on dévore cet addictif thriller historique, hommage appuyé à un héros méconnu et plongée hallucinante dans une Rome labyrinthique que l’auteur a pris soin d’explorer en profondeur avant de prendre la plume. (3/5/5)

 

 

Citations :

La neutralité est le pire des extrémismes ; sans elle, nulle tyrannie ne peut s’épanouir.

L’appréciation fugitive de leurs pairs insignifiants est toujours un puissant accélérateur chez les malotrus car ils vivent dans la grande crainte de n’être rien, même parmi leurs semblables.

Il m’est venu à l’esprit que ce que nous appelons commodément charité n’est qu’une forme de vanité déguisée, une simple manière d’envelopper de fumée les signes de notre supériorité, peut-être pour nous-mêmes, afin que cette fumée dérobe aux regards notre laideur.

La cité la plus majestueuse d’Europe porte un masque. Derrière, elle cache bien des secrets. Ainsi un verset de la Bible, Jean, 14.2, a pris pour moi un sens plus vaste. « Dans la maison de mon père, il y a plusieurs demeures. »

Je n’étais pas croyante, j’avais été élevée dans un athéisme satisfait. Selon ma vision de l’univers, et cela n’a pas changé, il n’y avait rien à espérer et rien à redouter ; vivre cette vie était un miracle suffisant en soi.

La bêtise a ses ruses, sinon elle aurait depuis longtemps disparu.

 

 

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