J'ai moyennement aimé
Titre : Neige et corbeaux (Baixue wuya)
Auteur : CHI Zijian
Traducteur : François SASTOURNE
Parution : en chinois en 2010,
en français en 2020 (Picquier)
Pages : 368
Présentation de l'éditeur :
En 1910 une
épidémie de peste, la dernière de la planète, frappe Harbin, dans la
région la plus au nord de la Chine. C’est une ville nouvelle et dans le
désordre des ruelles enneigées se côtoient Russes, Japonais et Chinois,
tout un monde cosmopolite et truculent. Avant que l’épidémie ne réduise
tous les bonheurs en miettes.
En s’appuyant sur un formidable travail de documentation et de recherche, Chi Zijian a entrepris de dessiner une carte de la ville puis installé sur cette carte les scènes de son roman, les pavillons avec jardin, les églises, l’entrepôt de céréales, l’auberge des Trois Kangs, les maisons closes, la distillerie, l’écurie où dort le cocher de fiacre, les deux ormes et leur nuée de corbeaux, la pharmacie, le magasin de bonbons… C’est ainsi que le vieil Harbin a repris vie, avec les multiples histoires de ses habitants enchevêtrées les unes aux autres, dans une épopée vibrante d’énergie et de volonté de survivre.
En s’appuyant sur un formidable travail de documentation et de recherche, Chi Zijian a entrepris de dessiner une carte de la ville puis installé sur cette carte les scènes de son roman, les pavillons avec jardin, les églises, l’entrepôt de céréales, l’auberge des Trois Kangs, les maisons closes, la distillerie, l’écurie où dort le cocher de fiacre, les deux ormes et leur nuée de corbeaux, la pharmacie, le magasin de bonbons… C’est ainsi que le vieil Harbin a repris vie, avec les multiples histoires de ses habitants enchevêtrées les unes aux autres, dans une épopée vibrante d’énergie et de volonté de survivre.
Le mot de l'éditeur sur l'auteur :
Chi Zijian est née en 1964 dans la province de Heilongjiang, où elle
réside toujours. Elle commence à publier dès 1985. Son écriture tour à
tour sensible et poétique s’attache à décrire les réalités les plus
banales de la vie. En 2008, elle a obtenu le grand prix Mao Dun pour son
roman Le Dernier Quartier de la lune. Trois de ses ouvrages ont paru aux éditions Bleu de Chine : Le Bracelet de Jade, La Danseuse de Yangge et La Fabrique d’encens. Elle est le seul écrivain à avoir obtenu trois fois le prestigieux prix Lu Xun.
Avis :
En 1910 éclate la grande peste mandchoue, dans le nord-est de la Chine : elle ne tarde pas à atteindre la ville de Harbin, la plus septentrionale du pays, très internationale en raison de la présence de Russes, de Japonais, d’Américains et d’Européens travaillant à la liaison ferroviaire entre le Transsibérien et la mer. En un peu plus d’un an, elle fera plus de 60 000 victimes dans la région, dont un tiers de la population de Harbin, principalement dans son quartier chinois, plus concentré et plus pauvre. Confinée, sa population doit s’adapter, s’entraider, gérer ses morts, sans comprendre comment la maladie se propage…
A l’intérieur d’un cadre historique parfaitement exact, Chi Zijian s’est attachée à imaginer le quotidien des habitants de Harbin : autant de petites gens exerçant mille métiers, dont elle a reconstitué l’existence dans tous ses détails, nous plongeant dans la vie d’un quartier, son réseau de relations humaines, son organisation et ses vicissitudes. Le résultat est hautement exotique pour le lecteur européen, mais résonne étrangement en écho avec notre expérience de pandémie actuelle : ville bouclée, médecins débordés, isolement des malades dans des wagons ferroviaires, solidarité et fabrication de masques par tout un chacun, faillites de certains métiers, opportunités pour d’autres, et aussi terrible question logistique quant à l’amoncellement des cadavres.
Le travail de l’auteur est immense, avec ses dizaines de personnages incarnés avec précision et réalisme, et la reconstitution de toute une vie de quartier au début du XXe siècle. Ce tour de force de l’écrivain s’avère toutefois une épreuve pour le lecteur, en particulier lorsqu’il est occidental et qu’il peine à mémoriser les nombreux noms chinois. Vite perdu dans cette pléiade de personnages, celui-ci n’a guère de chance non plus de s’attacher à l’un plutôt qu’à l’autre, le récit n’en faisant émerger aucun en particulier. Assez rapidement, malgré l’intérêt du sujet et les qualités littéraires du roman, l’ennui s’installe et la lecture devient fastidieuse.
Intéressant pour ce qu’il offre de découvertes historiques et culturelles, étrangement en résonance avec notre actualité, ce livre sérieusement mené et d’une qualité de style indéniable s’est paradoxalement avéré pour moi une lecture pensum : la foule de ses personnages saisis dans leur quotidien aura eu raison de mon attention et de mon empathie. (2/5)
A l’intérieur d’un cadre historique parfaitement exact, Chi Zijian s’est attachée à imaginer le quotidien des habitants de Harbin : autant de petites gens exerçant mille métiers, dont elle a reconstitué l’existence dans tous ses détails, nous plongeant dans la vie d’un quartier, son réseau de relations humaines, son organisation et ses vicissitudes. Le résultat est hautement exotique pour le lecteur européen, mais résonne étrangement en écho avec notre expérience de pandémie actuelle : ville bouclée, médecins débordés, isolement des malades dans des wagons ferroviaires, solidarité et fabrication de masques par tout un chacun, faillites de certains métiers, opportunités pour d’autres, et aussi terrible question logistique quant à l’amoncellement des cadavres.
Le travail de l’auteur est immense, avec ses dizaines de personnages incarnés avec précision et réalisme, et la reconstitution de toute une vie de quartier au début du XXe siècle. Ce tour de force de l’écrivain s’avère toutefois une épreuve pour le lecteur, en particulier lorsqu’il est occidental et qu’il peine à mémoriser les nombreux noms chinois. Vite perdu dans cette pléiade de personnages, celui-ci n’a guère de chance non plus de s’attacher à l’un plutôt qu’à l’autre, le récit n’en faisant émerger aucun en particulier. Assez rapidement, malgré l’intérêt du sujet et les qualités littéraires du roman, l’ennui s’installe et la lecture devient fastidieuse.
Intéressant pour ce qu’il offre de découvertes historiques et culturelles, étrangement en résonance avec notre actualité, ce livre sérieusement mené et d’une qualité de style indéniable s’est paradoxalement avéré pour moi une lecture pensum : la foule de ses personnages saisis dans leur quotidien aura eu raison de mon attention et de mon empathie. (2/5)
Citations :
Curieusement, une femme même très belle, pour peu qu’elle ait mauvais caractère, aura toujours l’air renfrogné et déplaisant, quel que soit le regard qu’on porte sur elle ; alors qu’une femme au caractère calme et amène arrivera à transformer un physique ordinaire en une prestance attrayante.
« Le “joujou” que les eunuques perdent à la castration, en général il est gardé dans de la chaux et suspendu à une poutre dans leur maison ou chez le maître qui a procédé à la castration, c’est ça qu’on appelle leur gaosheng. Quand l’eunuque atteint quarante ou cinquante ans on le décroche, et on le place dans la tombe des ancêtres. Si on le perd, on ne peut pas être enterré avec ses aïeux. »
La rangée de baraques ressemblait à la dentition d’un vieillard, de l’extérieur elle avait l’air à peu près normale, mais à l’intérieur ce n’étaient que dents cassées et manquantes.
— Je me demande si les gens aiment porter nos masques, remarqua Yu Qingxiu.
— Ça m’étonnerait ! dit la dondon. Vous avez vu le grand patron, est-ce qu’il en met un ?
— Exactement, dit Yu Qingxiu. J’ai essayé, et c’est difficile de respirer avec. J’attends un bébé, et j’ai peur que si j’en mets un, ça le suffoque, et qu’après la naissance il aime le renfermé. »
La grosse renchérit : « Je vous le dis, si on reste à la maison, pas la peine d’en mettre. Ces masques me font rire, après tout, nos bouches ne sont pas des portes, pourquoi y mettre un rideau ? »
Yu Qingxiu pouffa : « C’est pour cacher les disputes entre la langue et les dents, à mon avis. »
Le vent glacial et la neige sont de fréquents visiteurs en hiver, mais il est rare qu’ils viennent en même temps. Le premier est un solitaire qui vient quand ça lui chante et repart de même. Il tient dans ses mains un couteau imaginaire, qui coupe les visages à l’improviste ; alors, on ne voit pas de passants se haussant du col, chacun ressemble à une tortue qui rentre la tête. La neige a l’air froide mais en réalité elle est douce. Qu’elle soit fine comme de la poudre ou à gros flocons aussi pimpants que des fleurs de poirier, on l’essuie d’un geste insouciant de son visage, elle est familière. Les gens avaient ainsi décidé que le vent glacial était un démon envoyé par le ciel et la neige un ange. Cependant, parfois, l’ange était kidnappé par le diable et pouvait déchoir (…)
« Le “joujou” que les eunuques perdent à la castration, en général il est gardé dans de la chaux et suspendu à une poutre dans leur maison ou chez le maître qui a procédé à la castration, c’est ça qu’on appelle leur gaosheng. Quand l’eunuque atteint quarante ou cinquante ans on le décroche, et on le place dans la tombe des ancêtres. Si on le perd, on ne peut pas être enterré avec ses aïeux. »
La rangée de baraques ressemblait à la dentition d’un vieillard, de l’extérieur elle avait l’air à peu près normale, mais à l’intérieur ce n’étaient que dents cassées et manquantes.
— Je me demande si les gens aiment porter nos masques, remarqua Yu Qingxiu.
— Ça m’étonnerait ! dit la dondon. Vous avez vu le grand patron, est-ce qu’il en met un ?
— Exactement, dit Yu Qingxiu. J’ai essayé, et c’est difficile de respirer avec. J’attends un bébé, et j’ai peur que si j’en mets un, ça le suffoque, et qu’après la naissance il aime le renfermé. »
La grosse renchérit : « Je vous le dis, si on reste à la maison, pas la peine d’en mettre. Ces masques me font rire, après tout, nos bouches ne sont pas des portes, pourquoi y mettre un rideau ? »
Yu Qingxiu pouffa : « C’est pour cacher les disputes entre la langue et les dents, à mon avis. »
Le vent glacial et la neige sont de fréquents visiteurs en hiver, mais il est rare qu’ils viennent en même temps. Le premier est un solitaire qui vient quand ça lui chante et repart de même. Il tient dans ses mains un couteau imaginaire, qui coupe les visages à l’improviste ; alors, on ne voit pas de passants se haussant du col, chacun ressemble à une tortue qui rentre la tête. La neige a l’air froide mais en réalité elle est douce. Qu’elle soit fine comme de la poudre ou à gros flocons aussi pimpants que des fleurs de poirier, on l’essuie d’un geste insouciant de son visage, elle est familière. Les gens avaient ainsi décidé que le vent glacial était un démon envoyé par le ciel et la neige un ange. Cependant, parfois, l’ange était kidnappé par le diable et pouvait déchoir (…)
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