J'ai beaucoup aimé
Titre : En bas dans la vallée (Giú nella valle)
Auteur : Paolo COGNETTI
Traduction : Anita ROCHEDY
Parution : 2023 en italien,
2024 en français (Stock)
Pages : 155
Présentation de l'éditeur :
Fredo et Luigi ont grandi dans la Valsesia, une vallée montagneuse du
nord de l'Italie. Ils se ressemblent tout en étant très différents,
comme les arbres que leur père a plantés à leur naissance. Pour Luigi,
un mélèze, qui regarde vers le soleil et ondoie dans le vent. Pour
Fredo, un sapin fort et résistant, qui s’épanouit à l’ombre.
Betta, milanaise et lectrice de Karen Blixen, a traversé de façon fugace la vie de Fredo pour s'enraciner dans celle de Luigi, qui est devenu garde forestier. Alors que le couple attend une petite fille, Fredo est de retour après sept ans au Canada. Depuis la mort du père, les deux frères n’ont en commun que leur addiction à l’alcool et la vieille maison familiale, là-haut sur la montagne. Luigi voudrait racheter la moitié de Fredo, pour y commencer une nouvelle vie avec Betta. Mais sur ces terres rudes et oubliées de tous, un verre ou un mot de trop suffisent parfois à libérer les ténèbres de la vallée, et à transformer les chiens en loups.
Dans ce roman dur et poli comme la pierre, Paolo Cognetti descend des glaciers du Mont Rose pour raconter les existences fragiles des habitants de la vallée – et celles des animaux et de la nature qui les entourent.
Betta, milanaise et lectrice de Karen Blixen, a traversé de façon fugace la vie de Fredo pour s'enraciner dans celle de Luigi, qui est devenu garde forestier. Alors que le couple attend une petite fille, Fredo est de retour après sept ans au Canada. Depuis la mort du père, les deux frères n’ont en commun que leur addiction à l’alcool et la vieille maison familiale, là-haut sur la montagne. Luigi voudrait racheter la moitié de Fredo, pour y commencer une nouvelle vie avec Betta. Mais sur ces terres rudes et oubliées de tous, un verre ou un mot de trop suffisent parfois à libérer les ténèbres de la vallée, et à transformer les chiens en loups.
Dans ce roman dur et poli comme la pierre, Paolo Cognetti descend des glaciers du Mont Rose pour raconter les existences fragiles des habitants de la vallée – et celles des animaux et de la nature qui les entourent.
Le mot de l'éditeur sur l'auteur :
Paolo Cognetti est né à Milan en 1978. Les Huit Montagnes
(Éditions Stock, 2017), son premier roman, lauréat du prix Médicis
étranger et du Prix Strega, a été publié dans quarante pays et s’est
vendu à deux millions d’exemplaires à travers le monde. Son adaptation
cinématographique a reçu de nombreuses distinctions, dont le Prix du
Jury du 75e Festival de Cannes. La majorité de son œuvre est publiée aux Éditions Stock et au Livre de poche : Sans jamais atteindre le sommet (2019 – Prix de la Toison d’or), Carnets de New York (2020) et La Félicité du loup (2021).
Avis :
Après l’immense succès de Les huit montagnes qui l’ont fait connaître au monde entier, Paolo Cognetti met à nouveau à l’honneur le pays du Mont Rose, sa région de coeur au nord de l’Italie, pour une histoire âpre et noire, aussi fulgurante qu’un jet de pierre, où transparaissent, entre ombre et lumière, les peurs crépusculaires d’un monde écartelé entre nature et progrès.Ils sont deux frères que tout oppose, à l’image de ces deux arbres, un mélèze et un sapin de maintenant trente-sept et trente-cinq ans, que leur père avait plantés à leur naissance au pied de la maison familiale, une vieille bâtisse demeurée dans son jus au coeur des pâturages baignés des reflets de lumière du Mont Rose, en surplomb de la sombre vallée lombarde de Valsesia. Le père ayant mis fin à sa maladie d’un coup de fusil, l’aîné Luigi, garde forestier aspirant tant bien que mal à une vie rangée auprès de sa jeune épouse enceinte, retrouve pour la succession son tumultueux cadet Alfredo, parti s’embaucher il y a sept ans dans les forêts canadiennes après des démêlés avec la justice italienne.
Ces deux âmes tourmentées - leurs instincts, plus pour l’un que l’autre, empreints d’une animalité sauvage ne trouvant bien souvent que l’alcool pour s’assouvir dans le monde industrieux qui a domestiqué les hommes - sont comme chien et loup, le premier plutôt assagi, le second supportant toujours mal l’enclos et la longe. Un rien, mauvaise parole ou geste malheureux déformés par les vapeurs éthyliques, peut suffire à déclencher le drame. Comme d’ailleurs cette battue qui s’organise sur les traces, semées de chiens éventrés, d’une bête tueuse, elle aussi peut-être chien, peut-être loup, ou encore un mélange des deux.
D’une densité et d’une concision propres à en démultiplier l’impact balistique, le récit implacablement sombre file la métaphore de l’entre chien et loup pour une peinture crépusculaire d’un monde qui voit se préciser le pire quant à son avenir, sans pour autant concevoir de renoncer aux « progrès » qui menacent de le détruire. Nature sauvage ou domestiquée, instincts de liberté ou asservissement au confort, lumières des cimes ou ombres de la vallée : la superbe indifférente et majestueuse du Mont Rose surplombe les errements des hommes, certains supportant plus mal que d’autres le prix payé pour des aises enchaînées aux contraintes de la société de consommation. Alors, définitivement chiens ou possibles loups sur le retour ? Quand le monde tangue, bien souvent les instincts se déchaînent… (4/5)
Citation :
Grato, dit-elle, t’as entendu pour la remontée mécanique ?
Oui, j’ai entendu.
Ça va amener du changement, hein ? Des gens reviendront peut-être vivre ici. Ça pourrait être pas mal.
Ma foi.
Tu penses pas ?
Le vieux lève la main et montre la route, à l’endroit où elle disparaît derrière le hameau. Il a un doigt noueux et arthritique. C’est le chef Kinanjui qui parle, il dit : Un jour, par ce virage, la première tronçonneuse est arrivée. Elle était si lourde qu’ils l’ont amenée à dos d’âne, il fallait être deux bonshommes pour la manipuler. On a remisé la scie à deux mains. Et maintenant il nous faut de l’essence pour couper les arbres.
C’est quand même plus pratique, non ?
Grato fait mine de ne pas entendre. Il tousse. Dit : Après, ç’a été la route goudronnée, avant on montait ici que par le sentier.
C’était quand ?
C’est pas si vieux. Il y a vingt ans.
Donc la route est arrivée, et ?
Et les gens sont descendus travailler à l’usine. Tout le monde a foutu le camp. Et maintenant, c’est le tour de la remontée.
Il faut voir. C’est encore qu’un projet.
Dio fa’.
Oui, j’ai entendu.
Ça va amener du changement, hein ? Des gens reviendront peut-être vivre ici. Ça pourrait être pas mal.
Ma foi.
Tu penses pas ?
Le vieux lève la main et montre la route, à l’endroit où elle disparaît derrière le hameau. Il a un doigt noueux et arthritique. C’est le chef Kinanjui qui parle, il dit : Un jour, par ce virage, la première tronçonneuse est arrivée. Elle était si lourde qu’ils l’ont amenée à dos d’âne, il fallait être deux bonshommes pour la manipuler. On a remisé la scie à deux mains. Et maintenant il nous faut de l’essence pour couper les arbres.
C’est quand même plus pratique, non ?
Grato fait mine de ne pas entendre. Il tousse. Dit : Après, ç’a été la route goudronnée, avant on montait ici que par le sentier.
C’était quand ?
C’est pas si vieux. Il y a vingt ans.
Donc la route est arrivée, et ?
Et les gens sont descendus travailler à l’usine. Tout le monde a foutu le camp. Et maintenant, c’est le tour de la remontée.
Il faut voir. C’est encore qu’un projet.
Dio fa’.
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