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Titre : Lumière d'été, puis vient la nuit
(Sumarljós og svo kemur nóttin)
Auteur : Jon Kalman STEFANSSON
Traducteur : Eric BOURY
Parution : 2005 en Islandais,
2020 en France
Editeur : Grasset
Pages : 320
Présentation de l'éditeur :
Dans un petit village des fjords de l’ouest, les étés sont courts. Les
habitants se croisent au bureau de poste, à la coopérative agricole,
lors des bals. Chacun essaie de bien vivre, certains essaient même de
bien mourir. Même s’il n’y a ni église ni cimetière dans la commune, la
vie avance, le temps réclame son dû.
Pourtant, ce quotidien si ordonné se dérègle parfois : le retour d’un ancien amant qu’on croyait parti pour toujours, l’attraction des astres ou des oiseaux, une petite robe en velours sombre, ou un chignon de cheveux roux. Pour certains, c’est une rencontre fortuite sur la lande, pour d’autres le sentiment que les ombres ont vaincu - il suffit de peu pour faire basculer un destin. Et parfois même, ce sont les fantômes qui s’en mêlent…
En huit chapitres, Jón Kalman Stefánsson se fait le chroniqueur de cette communauté dont les héros se nomment Davíð, Sólrún, Jónas, Ágústa, Elísabet ou Kristín, et plonge dans le secret de leurs âmes. Une ronde de désirs et de rêves, une comédie humaine à l’islandaise, et si universelle en même temps. Lumière d’été, puis vient la nuit charme, émeut, bouleverse.
Pourtant, ce quotidien si ordonné se dérègle parfois : le retour d’un ancien amant qu’on croyait parti pour toujours, l’attraction des astres ou des oiseaux, une petite robe en velours sombre, ou un chignon de cheveux roux. Pour certains, c’est une rencontre fortuite sur la lande, pour d’autres le sentiment que les ombres ont vaincu - il suffit de peu pour faire basculer un destin. Et parfois même, ce sont les fantômes qui s’en mêlent…
En huit chapitres, Jón Kalman Stefánsson se fait le chroniqueur de cette communauté dont les héros se nomment Davíð, Sólrún, Jónas, Ágústa, Elísabet ou Kristín, et plonge dans le secret de leurs âmes. Une ronde de désirs et de rêves, une comédie humaine à l’islandaise, et si universelle en même temps. Lumière d’été, puis vient la nuit charme, émeut, bouleverse.
Le mot de l'éditeur sur l'auteur :
Né en 1963, Jón Kalman Stefánsson est l’auteur d’une œuvre importante traduite dans le monde entier. Son roman Ásta, publié en août 2018, a été un grand succès en France, et ses précédents romans, notamment Entre ciel et terre et D’ailleurs les poissons n’ont pas de pieds, repris en Folio, sont déjà des classiques. La version originale de Lumière d’été, puis vient la nuit a été publiée en 2005 en Islande.
Avis :
Dans ce petit village d’Islande où les saisons se succèdent en ne se différenciant que par la longueur de jour laissée par la nuit, le quotidien est si morne que les plus petits détails font figure d’évènements et ne passent inaperçus de personne. Un rien suffit parfois à susciter la tempête, dans un tourbillon irrationnel de désirs, de ressentiments ou de craintes…
Tel le coryphée d’une tragédie grecque observant et commentant les actions aveugles des personnages, l’auteur se poste en témoin extérieur d’une série de saynètes, mettant en scène les menus incidents qui font figure de cataclysmes dans la vie monotone de villageois ordinaires. Toutes ces petites histoires gravitent autour de pulsions et de désirs plus ou moins licites et assouvis, de rancunes et de frustrations, de peurs irraisonnées toujours prêtes à surgir. Si elles emplissent la vie de leurs protagonistes, elles prennent une coloration bien dérisoire sous l’oeil critique et les commentaires caustiques de leur scrutateur.
Elles deviennent alors l’occasion de quelques réflexions critiques sur l’ineptie de nos existences contemporaines qui, choyées comme jamais par le confort et la facilité, n’en rendent pas les humains plus heureux. Prisonniers d’une immédiateté égoïste qui les isole les uns des autres, efface ceux qui les ont précédés et ne laissera rien aux générations futures, les hommes n’ont tiré aucune sagesse de leurs nouveaux savoirs. La science a remplacé croyances et spiritualité sans répondre à leurs questionnements fondamentaux et sans éradiquer leur peur du noir et de la mort. Les comportements les plus irrationnels ne demandent qu’à resurgir chez des êtres qui, par ailleurs, n’ont jamais mis le progrès à profit pour réfléchir et donner la priorité aux valeurs essentielles de la vie.
Aussi bien écrit et pétri d’humour qu’il soit, ce livre m’a profondément ennuyée. Les épisodes s’accumulent sans grand lien les uns entre les autres, et surtout sans vraiment illustrer un propos certes intéressant mais somme toute peu creusé. Leur succession m’a d’autant plus découragée, qu’en plus de ne s’y passer pas grand-chose, leur narration froide et distanciée m’a interdit toute émotion et tout attachement aux personnages. Surnage chez moi une impression persistante d’absurde non-sens, sans doute recherchée par l’auteur, mais qui m’a plus durablement assommée qu’intéressée. (2/5)
Tel le coryphée d’une tragédie grecque observant et commentant les actions aveugles des personnages, l’auteur se poste en témoin extérieur d’une série de saynètes, mettant en scène les menus incidents qui font figure de cataclysmes dans la vie monotone de villageois ordinaires. Toutes ces petites histoires gravitent autour de pulsions et de désirs plus ou moins licites et assouvis, de rancunes et de frustrations, de peurs irraisonnées toujours prêtes à surgir. Si elles emplissent la vie de leurs protagonistes, elles prennent une coloration bien dérisoire sous l’oeil critique et les commentaires caustiques de leur scrutateur.
Elles deviennent alors l’occasion de quelques réflexions critiques sur l’ineptie de nos existences contemporaines qui, choyées comme jamais par le confort et la facilité, n’en rendent pas les humains plus heureux. Prisonniers d’une immédiateté égoïste qui les isole les uns des autres, efface ceux qui les ont précédés et ne laissera rien aux générations futures, les hommes n’ont tiré aucune sagesse de leurs nouveaux savoirs. La science a remplacé croyances et spiritualité sans répondre à leurs questionnements fondamentaux et sans éradiquer leur peur du noir et de la mort. Les comportements les plus irrationnels ne demandent qu’à resurgir chez des êtres qui, par ailleurs, n’ont jamais mis le progrès à profit pour réfléchir et donner la priorité aux valeurs essentielles de la vie.
Aussi bien écrit et pétri d’humour qu’il soit, ce livre m’a profondément ennuyée. Les épisodes s’accumulent sans grand lien les uns entre les autres, et surtout sans vraiment illustrer un propos certes intéressant mais somme toute peu creusé. Leur succession m’a d’autant plus découragée, qu’en plus de ne s’y passer pas grand-chose, leur narration froide et distanciée m’a interdit toute émotion et tout attachement aux personnages. Surnage chez moi une impression persistante d’absurde non-sens, sans doute recherchée par l’auteur, mais qui m’a plus durablement assommée qu’intéressée. (2/5)
Citations :
Car il se trouve encore des gens qui s’attellent à écrire des lettres. Nous entendons par là à l’ancienne mode, ils couchent les mots sur le papier, ou les écrivent sur le clavier de leur ordinateur puis les impriment, glissent la feuille dans une enveloppe qu’ils portent au bureau de poste, et que le destinataire reçoit au mieux le lendemain, mais bien souvent beaucoup plus tard. N’est-ce pas là s’accrocher à un monde disparu, une forme de passéisme, une tentative de rallumer des braises depuis longtemps éteintes ? Nous sommes habitués à la vitesse, on écrit les mots sur le clavier, on presse une touche et leur destinataire les reçoit aussitôt. C’est ce que nous nommons réactivité. Dans ce cas, pourquoi prendre la peine d’expédier une lettre par voie postale, une telle lenteur met notre patience à rude épreuve – autrement dit : pourquoi aller quelque part en charrette à cheval alors qu’on dispose d’un bolide ? Les mots stockés dans les ordinateurs sont condamnés à sombrer dans le néant, claquemurés dans des logiciels obsolètes, définitivement perdus quand la machine plante, nos pensées et nos réactions disparaissent. D’ici à un siècle, et plus encore dans un millénaire, personne ne saura que nous avons existé. Naturellement, nous ne devrions pas nous en alarmer, nous vivons ici et maintenant, mais un jour, nous tombons sur d’anciennes lettres qui remuent au fond de nous un je-ne-sais-quoi, nous avons l’impression de retrouver un fil attaché à notre personne, et qui plonge dans le passé, alors, nous pensons, voilà le lien qui unit les siècles :
Londres, le 28 mai 1759,
reviens vite de cette guerre imbécile, rentre tout de suite à la maison pour mordiller mes seins. Je ne suis rien, je suis perdue en ton absence.
Les messages que nous échangeons par ordinateur auront disparu d’ici à quelques années et la pensée, le sentiment que nous sommes en train de rompre le lien nous obsède, ce fil qui part de notre personne plonge désormais dans le néant, nous créons un vide qui jamais ne se comblera. Nous tenons avant tout à faire preuve de loyauté envers notre temps plutôt qu’envers un hypothétique futur, et malgré tout, nous sommes rongés par la mauvaise conscience autant que si nous commettions un crime, d’ailleurs, nous sommes très doués pour engranger toutes sortes de culpabilités. Nous nous sentons coupables de ne pas lire assez, de ne pas parler suffisamment avec nos amis, de consacrer trop peu de temps à nos enfants ou à nos anciens. Nous optons pour le mouvement perpétuel plutôt que de nous installer confortablement pour écouter la pluie, boire un café, caresser une poitrine. Et jamais nous n’écrivons de lettres.
Les larmes ont la forme d’une barque à rames, la douleur et la peine sont tapies sous le banc de nage. Celui qui pleure à un enterrement, pleure également sa propre mort et en même temps celle du monde, parce qu’à la fin tout meurt et il ne reste rien.
Londres, le 28 mai 1759,
reviens vite de cette guerre imbécile, rentre tout de suite à la maison pour mordiller mes seins. Je ne suis rien, je suis perdue en ton absence.
Les messages que nous échangeons par ordinateur auront disparu d’ici à quelques années et la pensée, le sentiment que nous sommes en train de rompre le lien nous obsède, ce fil qui part de notre personne plonge désormais dans le néant, nous créons un vide qui jamais ne se comblera. Nous tenons avant tout à faire preuve de loyauté envers notre temps plutôt qu’envers un hypothétique futur, et malgré tout, nous sommes rongés par la mauvaise conscience autant que si nous commettions un crime, d’ailleurs, nous sommes très doués pour engranger toutes sortes de culpabilités. Nous nous sentons coupables de ne pas lire assez, de ne pas parler suffisamment avec nos amis, de consacrer trop peu de temps à nos enfants ou à nos anciens. Nous optons pour le mouvement perpétuel plutôt que de nous installer confortablement pour écouter la pluie, boire un café, caresser une poitrine. Et jamais nous n’écrivons de lettres.
Les larmes ont la forme d’une barque à rames, la douleur et la peine sont tapies sous le banc de nage. Celui qui pleure à un enterrement, pleure également sa propre mort et en même temps celle du monde, parce qu’à la fin tout meurt et il ne reste rien.
Jadis, la foi était notre sédatif, elle nous apportait l’espoir et définissait le but de nos vies, plus tard, la science l’a remplacée par le rêve d’un monde meilleur, d’une distance réduite entre les hommes, tout change. Les journées passent, puis les siècles, et aujourd’hui, la place de la religion se réduit pour ainsi dire à la messe du dimanche, la science est le domaine réservé des scientifiques de profession, et le rêve d’un monde meilleur s’est assoupi dans le canapé dernier cri. Le confort nous assaille, c’est à peine si nous gardons la tête hors de l’eau, perdus dans cet océan d’objets, nous somnolons, nous rêvons, et nos rêves se confondent avec les livrets en quadrichromie que publient les agences de voyages, ils s’immiscent entre les pages des magazines télé et prennent corps sur Internet. D’aucuns claironnent que les héros de chaque époque sont à l’image de leur temps et de leur environnement. Il y a un demi-siècle, nos modèles étaient peut-être les astronautes en qui nous voyions la grandeur de l’esprit humain, ils représentaient le triomphe de la science, l’accès à de nouveaux univers, une forme de témérité, nous n’affirmons pas que tout cela était caractéristique de cette période, loin de là, les symboles procèdent toujours par excès de simplification, mais tout de même – les héros de chaque époque sont un miroir de l’air du temps, de nos préoccupations, de nos rêves et de nos espoirs, un héros est un objectif, un phare qui nous guide, une consolation quand les vents sont contraires, l’homme en a besoin, c’est dans sa nature. Les grandes figures d’aujourd’hui ne sont-elles pas les journalistes, les architectes d’intérieur et les cuisiniers ?
« Il est des blessures si profondes et si proches du cœur / Que même la pluie sur les vitres de la cuisine devient parfois mortelle. »
Ne vous est-il jamais arrivé de vous dire que jamais dans l’Histoire nous n’avons vécu dans un tel confort, que l’individu n’a jamais eu à ce point la possibilité d’influer sur son environnement, qu’il n’a jamais été aussi simple de s’engager, mais que la volonté de le faire n’a jamais été aussi rare – comment se fait-il ? Se pourrait-il que la réponse se trouve dans une autre question : quels sont ceux qui tirent profit d’une telle situation ?
Qu’importe la vitesse à laquelle la science progresse, elle ne nous débarrasse pas de notre peur du noir, peut-être cette angoisse ne fait-elle au contraire qu’augmenter parce que l’homme moderne – j’entends par là le citadin, puisqu’on ne peut pas vraiment dire que nous soyons modernes – ne connaît plus les ténèbres, elles ont été éradiquées par une surabondance de lumière, un excès d’électricité. Les gens ne savent plus comment se débrouiller dans l’obscurité, ils ne savent plus tâter le sol de leurs pieds pour éviter de trébucher.
« Il est des blessures si profondes et si proches du cœur / Que même la pluie sur les vitres de la cuisine devient parfois mortelle. »
Ne vous est-il jamais arrivé de vous dire que jamais dans l’Histoire nous n’avons vécu dans un tel confort, que l’individu n’a jamais eu à ce point la possibilité d’influer sur son environnement, qu’il n’a jamais été aussi simple de s’engager, mais que la volonté de le faire n’a jamais été aussi rare – comment se fait-il ? Se pourrait-il que la réponse se trouve dans une autre question : quels sont ceux qui tirent profit d’une telle situation ?
Qu’importe la vitesse à laquelle la science progresse, elle ne nous débarrasse pas de notre peur du noir, peut-être cette angoisse ne fait-elle au contraire qu’augmenter parce que l’homme moderne – j’entends par là le citadin, puisqu’on ne peut pas vraiment dire que nous soyons modernes – ne connaît plus les ténèbres, elles ont été éradiquées par une surabondance de lumière, un excès d’électricité. Les gens ne savent plus comment se débrouiller dans l’obscurité, ils ne savent plus tâter le sol de leurs pieds pour éviter de trébucher.
L’être humain se confond avec ses actes or, la politique n’est que pouvoir et influence, il suffit de priver un homme public de l’un et de l’autre pour qu’il n’en reste rien.
Vous savez également que si nous continuons à vivre comme nous le faisons depuis des décennies, et là, nous parlons de l’humanité tout entière qui a certes effectué un grand bond en avant ; si nous ne transformons pas notre mode de vie et notre quotidien, nous courons à notre perte. Nous scions la branche sur laquelle nous sommes assis. Nous sommes à la fois le juge, le peloton d’exécution et le prisonnier attaché au poteau. Pourtant, nous vivons comme s’il n’y avait rien de plus naturel. En toute absurdité. Nous nous contentons simplement de réfléchir de temps à autre aux événements irrationnels, aux informations extravagantes, à l’absurdité des circonstances, à la déraison de la vie.
Nous sommes bien loin d’avoir surmonté notre peur de la nuit – qu’elle soit en nous, sous nos pieds ou n’importe où dans le monde.
La vie n’est en revanche que mouvement permanent, la poussière ne risque pas de se déposer à sa surface – puis un jour, tout se change en souvenirs et vous voilà mort.
Vous savez également que si nous continuons à vivre comme nous le faisons depuis des décennies, et là, nous parlons de l’humanité tout entière qui a certes effectué un grand bond en avant ; si nous ne transformons pas notre mode de vie et notre quotidien, nous courons à notre perte. Nous scions la branche sur laquelle nous sommes assis. Nous sommes à la fois le juge, le peloton d’exécution et le prisonnier attaché au poteau. Pourtant, nous vivons comme s’il n’y avait rien de plus naturel. En toute absurdité. Nous nous contentons simplement de réfléchir de temps à autre aux événements irrationnels, aux informations extravagantes, à l’absurdité des circonstances, à la déraison de la vie.
Nous sommes bien loin d’avoir surmonté notre peur de la nuit – qu’elle soit en nous, sous nos pieds ou n’importe où dans le monde.
La vie n’est en revanche que mouvement permanent, la poussière ne risque pas de se déposer à sa surface – puis un jour, tout se change en souvenirs et vous voilà mort.
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