vendredi 2 mai 2025

[Dalrymple, William et Anand, Anita] Le Koh-i-Noor

 



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Titre : Le Koh-i-Noor            

Auteurs : William DALRYMPLE et Anita ANAND

Traduction : Marie-Odile PROBST

Parution : en anglais en 2017
                  en français en 2018,
                  réédité en 2025 (Libretto)

Pages : 288

 

 

 

 

 

 

Présentation de l'éditeur :  

Le 29 mars 1849, un garçon de dix ans est introduit dans la salle des miroirs du fort de Lahore. Malgré ses craintes, il avance avec dignité : il est le maharajah du Pendjab. Au cours d'une cérémonie aussi fastueuse qu'humiliante, l'enfant va devoir reconnaître sa soumission à la Couronne britannique et céder à la reine Victoria non seulement l'un des territoires les plus riches de l'Inde, mais aussi l'objet le plus précieux du sous-continent, le célèbre diamant Koh-i-Noor, la Montagne de Lumière. Soucieux de lui établir un pedigree, les Anglais passent aussitôt commande d'une « biographie » de la pierre précieuse. Pour s'acquitter de sa tâche, le jeune fonctionnaire désigné par la Compagnie des Indes orientales a visiblement couru les bazars de Delhi, réunissant toutes les légendes et sornettes que colportait la tradition. L'histoire du Koh-i-Noor de William Dalrymple et Anita Anand dissipe les brumes de la mythologie, mais ce qu'elle révèle au lecteur d'aujourd'hui n'en est pas moins romanesque, avec son lot de meurtres et de trahisons : une archéologie de la cupidité, où se rejoignent les passions privées des maharajahs et la folie collective de l'impérialisme occidental.

 

Le mot de l'éditeur sur l'auteur : 

Historien et journaliste écossais, William Dalrymple parcourt l’Orient depuis une vingtaine d’années. Spécialisé dans la littérature de voyage, il est l’auteur de plusieurs livres parmi lesquels Le Moghol Blanc (2005) qui a remporté, entre autres, le prestigieux Wolfson Prize for History, La Cité des Djinns (2006) qui a reçu le Thomas Cook Travel Book Award, mais aussi Dans l’ombre de Byzance (2002), L’Âge de Kali (2004), Le Dernier Moghol (2008), Neuf vies (2010), Le Retour d’un Roi (2014), récompensé par le Kapuściński Award for Literary Reportage, Le Koh-i-Noor (2018) et Anarchie (2021), tous parus en français chez Noir sur Blanc. Il vit à Delhi avec son épouse et leurs trois enfants.

 

Avis :

Avant de rejoindre les joyaux de la Couronne britannique, le Koh-i-Noor – « montagne de lumière » en persan – a connu une histoire si sanglante que ce diamant d’une dimension et d’une pureté exceptionnelles en a conservé une aura de crainte. Sa réputation doit beaucoup aux diverses mythologies construites au cours des siècles. Mais qu’en est-il vraiment de l’histoire de cette pierre ? William Dalrymple, historien et journaliste d'origine écossaise vivant à Delhi et spécialiste de l'Inde, et Anita Anand, journaliste londonienne d'origine pendjabi, ont entrepris un minutieux travail historique qui, paru il y a quelques années, vient d’être réédité en français.

Selon les travaux de Dalrymple, c’est au début du XVIe siècle que l’on trouve les premières traces avérées du fameux diamant. Il orne alors le légendaire trône du Paon de Babur, fondateur de l’empire Moghol et maître de l’Inde du Nord. Il reste la pièce maîtresse du trésor des Moghols durant trois siècles, jusqu’à ce que Nadir Shah, terrible conquérant venu de Perse, ravage l’Inde et, entre autres fabuleux butins, emporte le Koh-i-Noor pour en faire un symbole de la force impériale persane. Mais, le sang appelant le sang, de guerres en rivalités familiales et assassinats, la dynastie perse des Afcharides voit quatre souverains se succéder en treize ans. L’on retrouve la trace du diamant à Lahore, au Pakistan, dans les mains de Ranjit Singh, fondateur de l’empire sikh qui s’étendit sur le Pendjab pendant la première moitié du XIXe siècle. La succession est là aussi difficile. Les assassinats laissent le pouvoir à un enfant de cinq ans, Dhulîp Singh, bientôt forcé à accepter la main mise de la Compagnie anglaise des Indes orientales et à céder le Koh-i-Noor à la Couronne britannique. Le dernier râja sikh connaîtra un sort funeste à la cour de la reine Victoria, pendant que le diamant entamera à Londres une nouvelle vie de controverses, racontée cette fois par Anita Anand.

Objet de convoitise, emblème de pouvoir, puis aujourd’hui symbole du pillage colonial pour l’Inde qui, après l’Iran, le Pakistan et même les talibans afghans, réclame régulièrement le diamant aux Britanniques, le Koh-i-Noor reflète dans ses facettes de grands pans d’Histoire assez peu racontés, où le faste et la puissance s’affichent dans l’éclat de gemmes par myriades, le tout acquis dans un tel bain de sang à répétition, entre trahisons, tortures et assassinats, que le joyau en est lui-même devenu le réceptacle de persistantes superstitions. Au point que, depuis la mère d’Elizabeth II, personne n’a plus osé porter la couronne où il fut serti en 1936.

Pour s’en tenir aux faits connus et non contestables, cet ouvrage historique minutieusement documenté n’en relate pas moins une histoire tellement tumultueuse et colorée qu’elle semble tout droit sortie d’une épopée des plus romanesques. En tous les cas, la morale n’en ressort pas sauve, démontrant que la plus grande malédiction reste de tout temps l’intarissable cupidité et l’inextinguible soif de pouvoir des humains. (4/5)

 

Citations :

Le Koh-i-Noor, d’antique gemme aux pouvoirs légendaires, était devenu une grenade diplomatique. 


Bien que ce ne fût pas le plus gros diamant en possession des Moghols – le Darya-i-Noor et le Grand Moghol étaient probablement à l’origine de calibre égal, et de nos jours, après la taille décidée par le prince Albert, il existe au moins quatre-vingt-neuf diamants d’un volume supérieur à celui du Koh-i-Noor –, il continue à jouir d’une notoriété qu’aucun de ses plus gros ou plus parfaits rivaux n’égale. Il est au centre des demandes de compensation pour les pillages de l’ère coloniale, et fait régulièrement l’objet de revendications de la part de ses différents pays d’origine.


L’histoire du Koh-i-Noor continue à soulever des questions historiques importantes non seulement pour notre appréciation du passé mais aussi pour le présent, car il sert de paratonnerre aux prises de position envers le colonialisme. La présence même du diamant à la Tour de Londres incite à se demander comment juger des pillages de l’époque coloniale. Doit-on simplement se contenter de hausser les épaules et accepter que cela fasse partie du tohu-bohu de l’histoire, ou devrions-nous tenter de redresser les torts du passé ?

 

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