J'ai beaucoup aimé
Titre : A petit feu (Something in Disguise)
Auteur : Elizabeth Jane HOWARD
Traduction : Cécile ARNAUD
Parution : en anglais en 1969,
en français (La Table Ronde)
en 2025
Pages : 336
Présentation de l'éditeur :
« Adjugé, vendu ! » C’est en ces termes qu’Alice, la fille du colonel
Herbert Browne-Lacey, songe à son avenir le jour où Leslie Mount lui
passe la bague au doigt. Si cet engagement précipité a le mérite de
l’éloigner de l’autorité paternelle, Alice comprend, trop tard, que
l’homme qui partagera désormais sa vie n’est pas si différent de son père.
C’est seulement une fois Alice partie que May, sa belle-mère, commence à prendre au sérieux les mises en garde de ses propres enfants, Oliver et Elizabeth, contre le colonel qu’elle a épousé en secondes noces et avec qui elle se retrouve désormais en tête à tête dans un austère manoir en rase campagne.
Car Elizabeth, malgré ses remords à l’idée d’abandonner sa mère, a elle aussi mis les voiles, pour suivre son frère qui mène une vie de bohème dans le Swinging London. Après des débuts mal assurés en tant que cuisinière à domicile, elle rencontre le grand amour. Voyages luxueux et villas en bord de mer, cette idylle a tout du rêve…
À ce portrait mordant d’une famille anglaise des années soixante, Elizabeth Jane Howard confère une tension palpable et explore, à travers le destin de ces trois femmes, le caractère incertain des relations amoureuses.
C’est seulement une fois Alice partie que May, sa belle-mère, commence à prendre au sérieux les mises en garde de ses propres enfants, Oliver et Elizabeth, contre le colonel qu’elle a épousé en secondes noces et avec qui elle se retrouve désormais en tête à tête dans un austère manoir en rase campagne.
Car Elizabeth, malgré ses remords à l’idée d’abandonner sa mère, a elle aussi mis les voiles, pour suivre son frère qui mène une vie de bohème dans le Swinging London. Après des débuts mal assurés en tant que cuisinière à domicile, elle rencontre le grand amour. Voyages luxueux et villas en bord de mer, cette idylle a tout du rêve…
À ce portrait mordant d’une famille anglaise des années soixante, Elizabeth Jane Howard confère une tension palpable et explore, à travers le destin de ces trois femmes, le caractère incertain des relations amoureuses.
Le mot de l'éditeur sur l'auteur :
Née en 1923, Elizabeth Jane Howard est l’auteur de quinze romans. Les Cazalet Chronicles – The Light Years, Marking Time, Confusion et Casting Off
– sont devenus des classiques modernes au Royaume-Uni et ont été
adaptés en série pour la BBC et pour BBC Radio 4. Elle a également écrit
son autobiographie, Slipstream. Elle est morte en janvier 2014, après la parution du 5e volume des Cazalet Chronicles, All Change.
Avis :
Après La saga des Cazalet et La longue vue, les Éditions de la Table Ronde poursuivent la traduction en français de l’œuvre d’Elizabeth Jane Howard (1923-2014), déjà consacrée comme classique outre-Manche. Ce cinquième roman épingle avec une ironie mordante la société anglaise des années soixante, à une époque où, malgré les avancées permises par la Seconde Guerre mondiale, les femmes aspirent à plus d’indépendance tandis que les hommes s’accrochent à leurs privilèges patriarcaux.
Ingénues ou plus aguerries, les femmes partagent ici un même désenchantement face au mariage et aux illusions qu’elles y avaient projetées. Ainsi May, veuve trop confiante, choisit de se remarier en fermant les yeux sur les signaux d’alerte émanant de son futur époux, le colonel Herbert Browne-Lacey, et se retrouve bientôt prisonnière d’une maison gigantesque, prétentieuse et sinistre, que ce dernier, désargenté, lui a fait acheter pour n’y vivre qu’à deux. L’atmosphère y est raide et lugubre, révélant peu à peu les desseins sombres et inavouables du mari, autoritaire et toxique, y compris dans son rôle de père. Sa fille Alice, pressée de fuir cette emprise, se jette à son tour dans le mariage, croyant y trouver refuge. Elle y découvre un nouveau joug, entre devoir conjugal, maternité et mainmise d’une belle-famille aussi oppressante que son père.
Complètent ce tableau familial les deux enfants adultes de May, Oliver et Elizabeth, installés ensemble à Londres. Diplômé d’Oxford mais peu enclin à une vie laborieuse, Oliver alterne petits boulots et parasitisme en attendant d’épouser une riche héritière. Son affection pour sa sœur ne l’empêche pas de profiter de ses talents domestiques. Issue de l’école des arts ménagers, Elizabeth subvient à leurs besoins en proposant ses services de cuisinière à une clientèle aisée friande de dîners privés. Moderne et indépendante, échappera-t-elle aux affres du mariage et de la vie de couple ordinaire ? Rien n’est moins sûr, car un coup de foudre avec un homme plus âgé et fortuné l’affranchit des conventions tout en l’exposant à d’autres formes de souffrance.
Si ces femmes échouent dans leurs aspirations, c’est qu’elles continuent de faire confiance aux hommes, découvrant trop tard leur erreur. Car en ces années 1960, rares sont ceux qui acceptent de remettre en question leur confort dans la répartition des rôles au sein du couple et de la famille. Fine observatrice, Elizabeth Jane Howard excelle à peindre les psychologies et leurs interactions. En quelques portraits et situations, elle compose un tableau vivant et crédible de son époque et du milieu qui fut le sien. Son style élégant s’accompagne d’un humour ravageur, so british dans sa noirceur et sa dérision feutrée, pour un texte d’une étonnante modernité dans ses visées féministes. (4/5)
Citations :
Oliver, qui ne se lassait jamais d’insulter la bâtisse, avait dit un jour qu’elle serait parfaite pour un producteur américain désireux de tourner un film de série B sur le thème de la maison hantée. Poutres, créneaux, fenêtres plombées, portes cloutées, affreuses et inutiles cheminées semblant tricotées au point de riz, brique couleur de foie, improbables morceaux de crépi (du vomi de dinosaure, dixit Oliver) : l’ensemble en faisait un véritable monument.
Elle songea à Alice, coincée dans la maison construite par Leslie, enceinte, et, malgré le mariage, encore plus seule qu’avant ; elle songea à sa mère, qui perdait obstinément son temps à effectuer des tâches ingrates et inutiles pour un raseur ; et elle songea à Oliver, qui gâchait son intelligence brillante et sa jeunesse par manque d’opportunités, de volonté ou autre… Elle ne voulait pas penser à Oliver ; en fait, de manière égoïste, elle ne voulait penser à aucun d’eux. Ensemble ils concouraient à faire de la vie une corde de funambule ; si l’on évoluait dessus sans regarder en bas, tout paraissait facile, mais si on avait le malheur de baisser les yeux…
Le pire, dans le mariage – du moins dans les premières années –, c’était que plus rien n’allait de soi, il fallait en permanence prendre l’autre en considération, faire preuve d’indulgence ou de fermeté, sans parler de la nécessité de modifier son comportement social – puisque ça, c’était censé aller de soi. Et qu’est-ce qu’on obtenait en échange ? La cuisine, quoique pas mauvaise, n’était pas au niveau de celle de sa mère. De la compagnie, mais tout bien considéré, il n’était pas sûr que les femmes soient tellement douées pour cet aspect de la vie. Jamais il n’aurait épousé une fille vulgaire comme Phyllis Bryson par exemple, qui s’esclaffait avec les hommes au pub – non merci, très peu pour lui. Il y avait le côté sexuel de la relation, mais ça non plus, ce n’était pas si simple. Il s’était peu à peu rendu compte qu’Alice n’était pas très portée sur la chose – certes, il n’aurait pas forcément vu d’un bon œil qu’elle le soit ; tout bien considéré, une femme sexuellement ardente ne pouvait en aucun cas être aussi ce que, faute d’un autre mot, il qualifiait de convenable. Il ne désirait donc pas qu’Alice soit différente dans le noir de ce qu’elle était, non, mais étant un homme normal, il aspirait parfois à un peu de changement. Il supposait que, quand elle aurait un ou deux enfants, tout s’arrangerait et deviendrait plus normal. Tout le monde en passait par là.
Jennifer a été privée de sa mère très jeune. Et même avant, elle était privée de mère maternante, si tu vois ce que je veux dire. Les égocentriques invétérés du genre de Daphne font des enfants comme on se met au tir à l’arc ou au clavecin : ils s’aperçoivent vite que cela nécessite un gros effort pour un résultat aléatoire. Jennifer n’a jamais été une enfant facile. Quand Daphne et moi avons fini par divorcer, elle était assez grande pour comprendre ce qui se passait, mais pas encore assez pour considérer la situation autrement qu’en termes de gain et de perte pour elle. Elle avait perdu une mère ; elle m’avait gagné, moi, d’une certaine manière. Depuis lors, je suis plus ou moins otage de sa sécurité. Les enfants sont assez doués pour ça.
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